Évêque du diocèse de Tarbes et de Lourdes, Mgr Brouwet est interrogé dans La Dépêche. Extrait :
De nombreuses affaires de pédophilie ont éclaté au sein de l’église, ces dernières années, comme celle qui a abouti à la condamnation du plus haut dignitaire de l’église de France, l’archevêque de Lyon, Mgr Barbarin, accusé d’avoir caché les agressions pédophiles d’un prélat aux autorités «pour préserver l’institution». Quelle est votre position sur le sujet ?
Il ne s’agit pas d’incriminer tel ou tel prélat. Sur cette question l’église a manqué de clairvoyance, même si elle a beaucoup évolué depuis vingt ans. Elle a mis beaucoup trop de temps à comprendre les enjeux, en particulier l’horreur des actes commis et le mal extrême fait aux victimes. Elle a voulu ensuite traiter exclusivement comme un péché, c’est-à-dire sur un plan spirituel, ce qui était aussi – et peut-être d’abord – un délit ou un crime qui relevait du domaine juridique.
Comme évêque de Tarbes et Lourdes, ma règle de conduite est constante : une collaboration entière et transparente avec la justice civile, une écoute et un accompagnement des victimes pour lesquelles les abus sont un véritable drame dont certaines ne se remettront jamais, le retrait par prudence du prêtre incriminé en attendant la conclusion de l’enquête.
Si vous aviez eu connaissance de tels faits, quelle aurait été votre réaction ?
J’ai eu personnellement à traiter ces sujets. Les quelques signalements que j’ai dû faire auprès du procureur de la République de Tarbes concernent des faits commis il y a de nombreuses années, certains en dehors du diocèse. Le plus important est de protéger les enfants et les jeunes d’un danger potentiel. Et de recevoir les victimes autant qu’il le faut pour les écouter et les accompagner.
Une cellule d’écoute est d’ailleurs en place depuis 2016 pour les recevoir et leur permettre de parler (paroledevictime@cartholique65.fr – tél. 07.89.78.59.35).
Notre église doit demeurer un lieu sûr pour les enfants. Voilà pourquoi j’ai nommé un prêtre responsable de la protection des mineurs et des personnes fragiles dans le diocèse des Hautes-Pyrénées, le père François Bustillo. Sa mission est de proposer des formations sur ces sujets pour tous ceux qui ont une responsabilité auprès des jeunes au catéchisme, dans le scoutisme, l’enseignement catholique, les mouvements de jeunes, y compris les prêtres. Sa mission est également de proposer des chartes de comportement que ces responsables doivent signer. Notez que ce travail a déjà commencé au Sanctuaire de Lourdes. Nous vérifions l’identité et le sérieux des 250 prêtres qui viennent confesser en leur demandant une recommandation de leur supérieur, un engagement écrit ainsi qu’un extrait du casier judiciaire. De la même manière, la qualité et l’honnêteté des bénévoles qui s’occupent des jeunes ou des personnes en fragilité aux piscines, à l’Accueil Notre-Dame et au village des jeunes, sont observées de près.
À la lumière de ces faits, est-il pertinent, selon vous, de reparler du mariage des prêtres ?
Je ne le crois pas. Pour deux raisons : d’abord, parce que c’est vraiment réduire le mariage que de le voir comme un antidote aux abus sexuels. Ensuite, parce que la grosse majorité des abus ont lieu dans le cadre familial de la part d’hommes ou de femmes qui ne sont pas célibataires.
Rappelez-vous qu’il y a plus de 8.000 déclarations de viols de mineurs en France, chaque année, et plus de 14.000 agressions et atteintes sexuelles également sur des mineurs. […]