L’évêque émérite de Clermont signe une tribune dans La Vie sur… les dernières élections au sein de la Fraternité Saint Pie X.
Attentif depuis longtemps au devenir de l’héritage de Mgr Lefebvre, je me permets ici une simple réaction, à la suite des élections qui se sont déroulées cet été, à la Fraternité Saint Pie X, à Écône.
Après un intermède de 24 ans, la Fraternité Saint Pie X est redevenue, comme Monseigneur Lefebvre l’avait établie au départ, après le schisme de 1988, une Église de structure « presbytérienne. »
En effet, le Supérieur Général est de nouveau un prêtre, en la personne de l’abbé italien Davide Pagliarani. Et ce prêtre est ainsi établi « chef » de trois évêques ! De 1988 à 1994, il s’agissait de l’Abbé Schmidberger. Quand Mgr Fellay lui a succédé, en 1994, Écône est redevenue « épiscopale ». Un évêque était le premier responsable de la Fraternité. Ce qui semblait davantage conforme à la grande Tradition catholique.
Mais voici que la Communauté est revenue à un schéma « presbytérien ». Selon des observateurs attentifs et avertis, il semble que l’élection de l’Abbé Pagliarani, pour succéder à Mgr Fellay, marque une rupture par rapport aux orientations de ce dernier. À plusieurs reprises, Mgr Fellay a montré qu’il était désireux d’accepter les nouvelles propositions du pape François pour réintégrer la Fraternité au sein de l’Église catholique, selon les statuts d’une prélature personnelle, comme celle de l’Opus Dei.
Le 3 mai 2017, le journal La Vie avait même annoncé que la réconciliation était imminente : « Une solution est proche. À Rome, presque plus personne n’en doute : après des décennies de rupture et de blocages, la Fraternité sacerdotale Saint-Pie-X (FSSPX) devrait bientôt rentrer dans le giron de Rome. Mgr Guido Pozzo, secrétaire de la Commission pontificale Ecclesia Dei, chargée de dialoguer avec elle, le confirme sans hésitation à La Vie. Du reste, dans d’autres récentes interviews, il avait déjà indiqué qu’on s’acheminait vers une réconciliation, “dans un avenir proche”. »
Mais nous voici en septembre 2018 et la réconciliation n’a toujours pas eu lieu. L’élection de l’Abbé Pagliarani comme supérieur général et de Mgr de Galarreta comme premier assistant est analysée par les observateurs comme un retour à une ligne plus intransigeante que celle suivie pendant ces vingt-quatre dernières années par Mgr Fellay. Si celui-ci veut malgré tout persévérer dans la voie de la réconciliation avec Rome, il devra prendre le risque d’une fracture au sein de la Fraternité qu’il a dirigée de 1994 à 2018. Une fois de plus, se vérifiera l’adage bien connu de Bossuet : « Qui divise se divise. » Les Abbés Laguérie et Aulagnier en ont fait l’expérience avant lui.
Je n’ai pas compétence pour faire un commentaire plus approfondi sur la gouvernance de la Fraternité Saint Pie X. Mais je me permets simplement de trouver un peu étrange le fait que, sous prétexte de garder la tradition catholique, on applique les principes proposés par Jean Calvin puis développés par Ulrich Zwingli, en Suisse, et John Knox, en Écosse… Comprenne qui pourra !
Mgr Simon évoque sa compétence sur le sujet. Voici l’analyse du professeur Luc Perrin sur le Forum catholique :
l’archevêque émérite doit savoir qu’une société de vie apostolique comme la FSSPX n’a pas vocation à être dirigée par un évêque. Son étonnement m’étonne : pour qu’une congrégation ait un évêque à sa tête, il faut une permission spéciale du Pape. En 1962, la permission de Jean XXIII avait été nécessaire pour confirmer l’élection de Mgr Lefebvre comme Supérieur général des Spiritains.
L’élection de l’abbé Pagliarani n’a rien que de très normale au plan canonique et un prêtre est dans ces sociétés de prêtres au-dessus en effet d’évêques pour ce qui est de l’Institut. Dans les congrégations missionnaires, c’est une chose courante et bien établie dans l’histoire.
Doit-on redire qu’il n’y a pas eu de “schisme” en 1988 mais des “actes schismatiques” (6 personnes) relatifs à la consécration sans mandat papal de 4 évêques ? Il y a bien longtemps que je fais attention moi-même à ne pas confondre les deux comme j’ai pu le faire dans ma lointaine jeunesse académique. Les précisions romaines à ce sujet se sont multipliées depuis la fin des années 1990.
Pour qu’il y ait une “Église presbytérienne”, il faudrait
a) que la FSSPX soit une “Église” séparée de Rome ce qu’elle n’est pas
b) qu’il n’y ait aucun évêque or elle en a trois. L’Église presbytérienne d’Écosse et les autres aux USA rejettent le ministère épiscopal par principe.
Si la situation canonique présente de la FSSPX n’est pas la pleine communion, force est de constater que le mot “schisme” ne la qualifie en aucune manière ni celui d’ “Église presbytériennne” qui relèverait plus d’un bon mot.