Le Mount St. Mary’s Seminary and College d’Emmitsburg
(gravure de 1835)
VI.
La réputation du Père Bruté comme pasteur, théologien et enseignant grandit.
Avant de devenir l’évêque de Vincennes, le Père Simon Bruté passa l’essentiel de sa vie de prêtre au Mount St. Mary’s Seminary and
College d’Emmitsburg (Maryland), établissement ouvert en tant que petit séminaire en 1808.
C’est ainsi que débuta ce qu’on nommerait « la Montagne » ou « le Mont ». Le Père Dubois voyait dans le petit séminaire du Mount St. Mary’s
comme « le réservoir » du grand séminaire St. Mary’s de Baltimore.
Le Mont fut parrainé par la Société de Saint-Sulpice jusqu’à ce qu’il finisse par devenir un grand séminaire et un collège indépendant.
Elizabeth Ann Seton et un groupe de femmes partageant des sentiments identiques et qui œuvraient avec elle à Baltimore, déménagèrent pour
Emmitsburg en juin 1809. La ferme construite en dur sur un terrain de 269 acres, soit environ 108 ha, acheté pour elles par Samuel Sutherland Cooper, n’était pas encore apprêté
pour les abriter, aussi le Père Jean Dubois leur offrit sa cabane en bois sur la montagne St. Mary’s. Elles y vivront six semaines avant d’intégrer la ferme
située dans la proche vallée que Mère Ann Seton nommera la Vallée Saint-Joseph.
Le 31 juillet 1809, les Sœurs de la Charité de Saint-Joseph furent fondées. Elles commencèrent leur existence selon la règle provisoire de
Saint-Joseph et selon le charisme des Filles de la Charité fondées en France par saint Vincent de Paul et sainte Louise de Marillac.
Le Père Dubois, futur évêque de New York, devint le troisième supérieur ecclésiastique de ce groupe.
Bruté fut nommé au Mount St. Mary’s Seminary à l’automne de 1812. Lui et Elizabeth Ann Seton firent
connaissance et, presque immédiatement, on pressentit une familiarité spirituelle qui se développera dans une relation spirituelle qui fut racontée. Elle enseigna l’anglais à
Simon qui continuait à éprouver des difficultés avec cette langue. Lui, en retour, devint le directeur spirituel de la future sainte Elizabeth Ann Seton et
aumônier de la communauté des sœurs. En 1813, le Père Bruté et la Mère Seton échangèrent leurs Bibles qui étaient identiques. Quand elle mourut, en 1821, elle
possédait toujours sa Bible. Après son inhumation, sa seule fille survivante, Catherine Josephine Seton, rendit au Père Bruté sa Bible, puis retourna à
Saint-Joseph avec l’exemplaire de sa mère.
Le Père Bruté devint une présence révérée au Mont. Il était un enseignant efficace en sciences sacrées pour les séminaristes. En raison des
circonstances et de la culture qui se développait en Amérique, il avait la profonde conviction de la nécessité d’une formation solide en philosophie et en théologie pour les futurs prêtres. On le
considérait comme un prêtre exemplaire à la sainteté signalée, dévoué dans son apostolat et expert en théologie. Son austérité était considérée à la fois comme édifiante et, parfois excentrique.
Outre un programme complet d’enseignement, on le demandait souvent pour confesser, porter l’Eucharistie aux grabataires et aux personnes âgées d’Emmitsburg de se ses environs. La plupart du temps
il s’y rendait à pied. « Comme elle est merveilleuse la journée d’un prêtre » remarqua-t-il un jour. Il fut un collaborateur fréquent de la presse catholique naissante de la côte
Est.
En 1815, Simon retourna en France pour rendre visite à sa mère âgée. Sa santé était déclinante mais son fils Augustin, qui
avait bien réussi dans la pratique médicale à Rennes, lui apportait ses meilleurs soins. Sa mère décéda à Rennes en 1823, mais Simon fut dans l’incapacité de se trouver à son
chevet. Il ne retourna à Rennes qu’en 1824 pour régler des problèmes afférents aux propriétés de sa mère.
Madame Bruté avait eu une influence décisive et profonde sur le progrès religieux et spirituel de son fils prêtre. Elle n’avait jamais désiré
qu’il intégrât le sacerdoce mais finit par se résigner à la volonté de Dieu et soutint son fils de ses lettres et de ses prières.
Le voyage de Simon en France avait aussi deux autres motivations. Il voulait rapporter ses chers livres qui constitueront ce qu’on estimera
être la plus prestigieuse bibliothèque privée d’Amérique. Il avait besoin de ses livres pour son enseignement et parce qu’il voyait en eux de précieux conseillers théologiques.
Il était aussi venu en France pour plaider la cause du Mount St. Mary’s College d’Emmitsburg auprès du supérieur général des Sulpiciens. Dès
son retour aux Etats-Unis, le Père Bruté apprit qu’on l’avait nommé président du St. Mary’s College de Baltimore, une fonction qu’il occupera de 1815 à 1818. Les
lettres qu’il adressa à Mère Seton au cours de cette période sont dépourvues de leur habituel ton joyeux. Il était seul. Il n’avait que peu d’amis à Baltimore, mais il est
historiquement utile que nous signalions qu’il y rendait visite à un certain Dr. Ferdinand E. Chatard, le père d’un futur évêque de Vincennes.
Apparemment, le Père Bruté fut nommé président du St. Mary’s College en raison de sa réputation d’érudit et non pour ses
capacités administratives. On sait que John Quincy Adams a déclaré un jour que Simon Bruté était l’homme le plus érudit d’Amérique. Il était connu pour « ses brillants
éclairs de perspicacité ».
Quand les évêques des Etats-Unis commencèrent à s’assembler en conciles provinciaux, le Père Bruté fut un vigoureux avocat de l’unité dans
l’enseignement et dans la pratique catholique. Il était préoccupé de l’intégrité de la foi dans l’Eglise naissante des Etats-Unis. Ce n’est pas une surprise que de le voir l’un des tout premiers
conseillers théologiques lors des conciles de Baltimore.
Notre premier évêque fut un théologien et un enseignant estimé, un confesseur achevé pour ceux qui recherchaient la miséricorde de Dieu, un pasteur pour les
infortunés grabataires et l’accompagnateur spirituel d’une religieuse fondatrice qui deviendrait une sainte canonisée.
De la manière dont les choses se passèrent, sa mère aurait pu mourir avec la fierté d’un tel fils menant sa vie comme elle le lui avait appris.
Le St. Marys’College and Seminary de Baltimore
(gravure sans doute de la deuxième moitié du XIXe siècle)
Demain :
VII. La passion du Père Simon Bruté d’être pasteur aux Etats-Unis éclate au grand jour
© Most Rev. Daniel M. Buechlein, Archbishop of Indianapolis (Indiana).
© Daniel Hamiche pour la traduction française.