Message de carême de Mgr Ginoux, évêque de Montauban :
« Sois fort, sois fidèle »,ces mots sont les premiers d’un chant que nous utilisons durant le Carême. Ils sont à eux seuls un programme de vie et un guide pour le changement intérieur auquel la Parole de Dieu nous invite. Le pape François nous encourage à puiser dans cette source vive qu’est la Parole de Dieu : c’est le moment, plus que jamais, de lire, d’écouter, de méditer cette Parole qui nous est donnée.
Il n’est pas très cher d’être abonné à « Prions en Eglise » ou « Magnificat » ou « Parole et Prière » pour avoir avec soi chaque jour la Parole de Dieu de la messe et, suivant les cas, un support pour la prière quotidienne. Tout fidèle catholique devrait utiliser, à défaut d’un missel relié et pérenne, ces publications de poche. La première fidélité est celle que Dieu demande à Israël son peuple : « Ecoute, Israël ». Et Jésus affirme « Heureux ceux qui écoutent la Parole de Dieu et qui la mettent en pratique » ou encore « Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et la mettent en pratique » (Luc 8,21). Cette fidélité à Dieu se vit dans ce que Jésus lui-même reprend de la loi divine : « Aimer Dieu par-dessus tout et son prochain comme soi-même ». Nous sommes fidèles dans la mesure où nous mettons en pratique ce commandement qui est la source de tous les autres. Jésus insiste sur la nécessité de suivre tout ce que ces commandements exigent (Matthieu 5,17-19) : il est venu non pas « abolir » mais « accomplir » la loi donnée à Moïse.
Comment vivre le Carême dans la fidélité au Christ ?
N’oublions pas qu’il ne s’agit pas seulement d’attitudes religieuses extérieures mais d’un changement intérieur où sont remis à la première place l’amour de Dieu et l’amour du prochain. Si, dans la suite de l’évangile (Matthieu 6, 1-18), nous avons à prier, jeûner, faire l’aumône, plus spécialement dans ce temps qui nous prépare à vivre l’évènement de Pâques, c’est d’abord pour rendre notre cœur capable de vivre ce sommet de la vie chrétienne, débarrassé de tous les encombrements, les bagages que notre égoïsme nous fait accumuler. La prière est « un simple regard d’amour sur le Seigneur ». Chaque jour je prends du temps pour lui, c’est ce temps donné gratuitement dans un cœur à cœur authentique qui est ma prière silencieuse, intérieure, indispensable pour être « un cœur qui écoute ». Dieu parle dans le silence et dans le secret. Peu à peu il me façonne à son image. Cette forme de prière est un abandon à la présence divine. Ce sera, chaque jour, dix ou quinze minutes que je peux trouver au milieu de mes activités pour les offrir au Seigneur. Ce sera, chaque semaine, un temps plus long et, peut-être même un temps dans un lieu propice (abbaye ou maison religieuse). Le jeûne n’est pas un exercice de domination de soi, c’est une manière de faire place à l’essentiel et de se libérer. Evidemment je ne suis peut-être pas soumis à des passions ou à des attachements peccamineux mais si tel est le cas c’est l’occasion de m’en défaire. Jeûner ( prendre un seul repas léger dans la journée, prendre du pain, de l’eau, des fruits) concerne les personnes en bonne santé pas encore trop marquées par la vieillesse. Mais on peut jeûner de bien d’autres besoins que ceux de la nourriture : la télé, l’écran de l’ordinateur, les ragots, les mauvaises paroles, les jugements expéditifs, les colères et les emportements, etc.). Le jeûne est un moyen de se « rééduquer le cœur ». Il se veut aussi inventif ! Enfin l’aumône est un moyen de purifier notre portefeuille et, surtout, de partager. Tout le monde peut partager : on peut partager peu ou beaucoup ! Dans son message de carême le pape François nous fait méditer la parabole de Lazare et de l’homme riche. Vous qui lisez ce texte vous êtes, comme moi, des « riches » au sens où vous ne manquez de rien de vital. C’est une grande grâce dont nous devons remercier chaque jour le Seigneur. Mais quel regard portons-nous vers les plus démunis et comment offrons-nous le montant du jeûne que nous pratiquons ? A quoi allons-nous renoncer pour aider le prochain à vivre (ou à survivre) ? Le jeûne combat notre égoïsme et ouvre au partage. Il nous apprend le manque pour nous attacher au Sauveur.
La force
Le cantique qui est à l’origine de cette réflexion invite à « être fort ». C’est peut-être un peu surprenant car la force, tel que ce mot est couramment employé, laisse entendre la notion de puissance et de domination. Il ne s’agit pas de cela mais de la force de la foi, de ce don qui vient de l’Esprit-Saint. Beaucoup d’entre vous ont reçu le très nécessaire sacrement de confirmation. Dans la célébration du sacrement, l’évêque impose les mains aux confirmands. Il prie l’Esprit-Saint, l’Esprit aux « sept dons » (Isaïe 11, 1-6). Parmi ces dons l’Esprit-Saint communique la force. Etre fort pour avancer vers Pâques c’est se laisser conduire par l’Esprit, « En lui seul ton appui » dit le même chant, et plus loin « marche encore vers ta joie » ! Ma force c’est le Christ vivant, lui qui me conduit dans la fidélité.