De Mgr Batut, évêque du diocèse de Blois
Chers Frères et Sœurs,
Vous savez tous le défi sans précédent que doit relever notre société, devenue en quelques décennies interculturelle et interreligieuse comme jamais auparavant dans son histoire.
Depuis le début de notre siècle, ce défi se complique du phénomène de la violence terroriste et du sentiment d’insécurité qui l’accompagne, avec la tentation de désigner des coupables et de mettre au premier plan l’autoprotection plutôt que le désir de connaître les autres et d’entrer en relation avec eux.
Comme disciples du Christ, nous avons moins que quiconque le droit de céder à cette tentation. Au contraire, tandis que les responsables politiques cherchent comment affronter ces difficiles questions, nous devons nous-mêmes être exemplaires et poser des signes forts pour tous nos contemporains. La devise de notre pays, dont le saint pape Jean-Paul II rappelait jadis l’origine chrétienne, se concentre trop souvent sur le mot « égalité », et oublie que sans fraternité l’égalité risque de tomber dans le nivellement égalitariste, et la liberté dans le repliement individualiste.
J’invite donc les diverses communautés de notre diocèse à envoyer un nombre significatif de représentants le samedi 10 décembre après-midi dans ce haut lieu symbolique qu’est notre cathédrale, pour un grand moment de fraternité avec nos frères et sœurs musulmans, qui viendront eux aussi à ce rendez-vous des quatre coins du département.
De quoi s’agit-il ? Sans y être poussés par des événements graves que nous espérons ne pas voir se reproduire, il s’agira non de prier, mais d’accueillir nos amis musulmans dans la maison de Dieu, de la leur présenter avec son histoire, et de leur dire comment nous y prions. Dans un second temps, il s’agira de se rencontrer de manière conviviale et de se souhaiter les uns aux autres une bonne fin d’année en nous engageant mutuellement à nous efforcer ensemble d’être des bâtisseurs de paix.
Comme vous le voyez, l’objectif de cette manifestation qui se tiendra de 15 heures à 17 heures, est à la fois très modeste et très ambitieux. Il n’est pas question de tout mélanger : nous sommes des catholiques qui accueillent chez eux des musulmans ; mais si nous le faisons en ce lieu, c’est pour nous rejoindre par le haut, c’est-à-dire par le Dieu créateur qui nous a voulus ensemble. En ce temps de l’Avent, où la crèche sera déjà présente, ce sera comme une anticipation du rassemblement des Nations auprès de l’Enfant-Dieu.
Nous pouvons escompter la présence de cent à cent cinquante personnes du côté musulman : pour que le mot « accueil » ait son sens, il faut donc que nous soyons un nombre équivalent du côté catholique. C’est pourquoi je demande à chaque doyenné d’envoyer une délégation de 25 personnes issues des divers ensembles pastoraux et représentatives des diverses générations. Je remercie ces personnes de bien vouloir s’inscrire à l’avance et annoncer ce qu’elles sont prêtes à apporter en spécialités solides et liquides pour le moment convivial (attention : pas de boissons alcoolisées).
Je ne saurais mieux conclure cette lettre qu’en citant ces paroles du Pape François qui nous invitent à l’audace de l’espérance : « Je ne veux pas une Église malade de la fermeture et du confort, une Église préoccupée d’être le centre… Plus que la peur de se tromper, j’espère que nous anime la peur de nous renfermer dans les structures qui nous donnent une fausse protection [et] dans les habitudes où nous nous sentons tranquilles » (La joie de l’Évangile, 49).
Dans cet esprit, je vous souhaite, chers Frères et Sœurs, la grâce et la paix de Dieu.
Jean-Pierre Batut, évêque de Blois