René Poujol se met en quatre pour contester la disparition des catholiques de gauche. C’est assez amusant. Sa thèse est la suivante :
Et si la «disparition» des cathos de gauche tenait pour une part à l’imposture idéologique d’un prétendu catholicisme décomplexé ?
En gros, ce ne sont pas les catholiques de gauche qui ont disparu, mais les catholiques de droite qui sont, certes de droite, mais pas catholiques. Intéressant n’est-il pas ?
En fait, l’idée selon laquelle les cathos de gauche auraient disparu – mais la gauche elle-même n’a-t-elle pas disparu ? – tient pour une large à l’imposture idéologique d’un catholicisme prétendument décomplexé. On n’existerait qu’à la condition de porter, toujours et partout, sa foi en bandouilière. C’est en tout cas ce que nous prêchent avec constance et délectation quelques évêques et abbés ensoutanés des beaux quartiers. Sauf que l’enfouissement qui a marqué toute une génération de « cathos de gauche » et que continue de vivre tranquillement une partie de la jeunesse catholique, ne procède pas d’un complexe mais d’une conviction.
Et qui continue de vivre tranquillement… Qu’est-ce qu’il ne faut pas lire : il ne doit pas être si tranquille René Poujol pour se fendre d’une telle analyse contestataire de la réalité. En effet, il cherche pourquoi les catholiques de gauche auraient disparu à partir de l’analyse de Gaël Brustier sur le printemps conservateur :
Fort bien, sauf que cela ne nous dit pas pourquoi les »cathos de gauche » auraient fondu comme neige au soleil. S’ils ont massivement refusé leurs voix au PS lors des dernières élections, ce n’est pas parce que de jeunes intellectuels catholiques battent le pavé médiatique. C’est parce que la gauche les a déçus, et notamment, pour certains d’entre eux, par son passage en force sur la loi Taubira.
Peut-être parce que les catholiques de gauche n’ont pas eu de postérité, pas d’enfants, pas de transmission de la foi… Où est-elle la jeunesse de gauche qui va aux JMJ ? Ah non, c’est trop conservateur, trop décomplexé comme mouvement. D’ailleurs, René Poujol fait l’impasse sur les pontificats de Jean-Paul II et Benoît XVI, qui ont décomplexé les catholiques convaincus.
Pas ces catholiques qui faisaient le tri dans le Magistère et notamment sur le mariage, comme René Poujol :
Oui, il y a de nombreux chrétiens de gauche qui étaient favorables à cette loi. Mais il y en avait aussi – j’en suis – qui, tout en s’accordant sur une conjugalité homosexuelle qui ne leur pose aucun problème, se sont opposés à la loi pour sa dimension d’ouverture à la filiation.
Il n’y a pas que la filiation : la reconnaissance juridique des unions entre personnes de même sexe est contraire à la foi catholique héritée de l’enseignement de la Genèse…
Autre pirouette de notre brillant analyste :
faut-il voter à gauche pour être de gauche ?
C’est intéressant : qu’est-ce qu’un vote de gauche ? L’électeur de NKM n’est-il pas un électeur de gauche ? Et celui de Bruno Le Maire, qui n’a pas voté contre la loi Taubira ? Voire d’Alain Juppé ?…
On pourrait poursuivre sur l’idée, à la mode et non dépourvue de fondement, d’un dépassement du clivage droite-gauche. Sauf que ceux qui, dans le monde catholique, la développent avec le plus de gourmandise en tirent généralement prétexte pour nous expliquer qu’il n’y aurait plus d’intellectuels catholiques que de droite. CQFD ! Et que nous autres, malheureux soixante-huitards conciliaires attardés serions désormais sans descendance. D’où notre aigreur bien compréhensible ! Pardon pour ce qui ne veut pas être une récupération grand-paternaliste, mais les jeunes chrétiens de Coexister, ils ne sont pas dans cette filiation ?
Coexister c’est 33 groupes en France, un mouvement “interconvictionnel”. Impressionnant…