Le 16 octobre dans l’église de Montségur, l’évêque de Pamiers Mgr Jean-Marc Eychenne fera une demande de pardon, au nom des catholiques d’Ariège, pour avoir participé à des actes contraires à l’Évangile, autrement dit une repentance visant la Croisade contre les Albigeois et plus précisément le bûcher de Montségur. Une célébration et une marche silencieuse vers le site de La Prade sont également prévues.
L’idée de demander pardon est née lors de différents entretiens avec plusieurs personnes chrétiennes à la mémoire blessée par la Croisade et le simple fait de tuer au nom de Dieu. Selon le porte-parole épiscopal (le Père Edouard de Laportalière) c’est la chanteuse occitane Muriel Batbie qui a permis que ces personnes se retrouvent. Au printemps 2016, l’évêque va voir Jean-François Laffont à l’Ostal d’Occitània. L’évêque consulte, notamment les Dominicains pour lesquels ce dossier est très sensible. La journée du 16 octobre est actée.
A 15H, une célébration -et non pas une messe- sera donnée dans l’Eglise de Montségur. Une liturgie avec des prises de parole, notamment de Mgr Jean-Marc Eychenne qui fera sa demande de pardon, au nom de l’Eglise d’Ariège, car ses compétences ne vont pas au-delà. L’Eglise regrette aussi la collusion qu’il y a eu à l’époque entre le pouvoir temporel (politique) et spirituel (l’Eglise). Selon le père Edouard de Laportalière, « c’est une erreur de considérer le temporel comme un allié dans de telles circonstances. » Dans son communiqué, l’Eglise d’Ariège précise :
« Nous demandons pardon au Seigneur d’avoir participé par certains de nos membres et certaines de nos institutions à des actes contraires à l’Évangile. Evangile dans lequel le Seigneur Jésus nous donne le commandement d’aimer notre prochain et de ne pas répondre à la violence par la violence »
Muriel Batbie chantera le Pater Cathare. Ensuite, il y aura une marche silencieuse vers le site de la Prade situé en dessous du parking qui mène au château, le véritable lieu où les 225 cathares ont péri le 16 mars 1244 sur le bûcher de l’Inquisition. Une procession avec des branches de laurier se fera au son du Graile e de la Bodèga de Xavier Vidal et Claude Roméro.
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Ajoutons tout de même que, à l’époque déjà, le pape Innocent III désavoua ceux qui se rendirent coupables d’atrocités. Rappelosn aussi que les Albigeois faisaient courir un grave danger à l’Église et à la société civile. Le concile de Latran, en 1139, puis le concile de Reims, en 1148, prononcèrent des sentences contre eux, et défendirent aux seigneurs de les recevoir sur leurs terres, sous peine d’interdit. Or les princes répondirent avec empressement à l’appel de l’Église ; ils mirent même tant d’ardeur dans la répression de l’hérésie qu’ils en vinrent bientôt à accuser la papauté de faiblesse et à réclamer de nouvelles mesures de rigueur. Alors, en 1179, le IIIe concile de Latran, puis, en 1184, sous l’inspiration du pape Lucius III et de l’empereur Frédéric Barberousse, le synode de Vérone portèrent des décrets qui enjoignaient aux évêques de rechercher, par eux-mêmes ou par des commissaires, ceux qui sur leur territoire étaient suspects d’hérésie, de les faire juger par l’officialité diocésaine et d’en faire exécuter la sentence par les magistrats civils. Mais ces mesures ne furent que médiocrement efficaces. Les évêques qui étaient souvent en rapports de parenté ou d’amitié avec les familles des hérétiques, montraient peu de zèle à suivre les prescriptions du synode. Ce fut seulement en 1207, et après l’assassinat du légat du Pape, Pierre de Castelnau, par les ordres du comte de Toulouse, Raymond VI, que le pape Innocent III résolut de mettre un terme à leurs violences contre les catholiques. Après avoir excommunié leur protecteur, le comte Raymond, le pape convoqua les princes et les peuples à une nouvelle croisade, non plus cette fois contre les infidèles, mais contre les hérétiques qui jetaient le trouble dans le pays. Les seigneurs accoururent et se rangèrent sous la bannière de Simon de Montfort, poussés plus, il est vrai, par les appâts du gain que par les intérêts de l’orthodoxie.
Sur le principe de la Croisade, Mgr Pie fit observer :
« Qu’on entende les Cathares, c’est-à-dire ceux qui s’intitulaient les “Purs” et que l’on suive la marche de leurs raisonnements. A leurs yeux, les prêtres, s’ils ne sont pas saints, ont perdu le caractère sacré du sacerdoce, et comme ils n’ont plus le pouvoir d’administrer les choses saintes, ils n’ont plus droit à posséder les biens ecclésiastiques. Le pillage commencera donc par l’Église. Mais la logique des Purs ne leur permet pas de s’arrêter là ; et de conséquences en conséquences, voici où ils arrivent. Tout chrétien, à quelque condition qu’il appartienne, roi, noble, bourgeois ou artisan, est dépouillé de son baptême par le péché, il devient infidèle et, à ce titre, il n’a plus de droit ni à son trône, ni à sa magistrature, ni à sa femme, ni à sa maison, ni à ses propriétés, ni au fruit de son travail : toutes choses qui entrent dans le domaine commun. C’est faire acte de religion, c’est obéir à Dieu que de leur mettre la main dessus. Le pillage commencé contre l’Église se continuera donc contre les grands, puis contre tous ceux qui possèdent, à moins qu’ils ne soient Purs ; mais qui pourra demeurer tel aux yeux du brigandage qui s’est fait juge ? Nous venons de lever un coin du voile qui cache les maux et les dangers de cette époque. Les deux dates les plus terribles contre l’Église et la société, contre la hiérarchie et la propriété, les deux ères qu’ont inaugurées le dix-huitième siècle expirant et le milieu du dix neuvième pouvaient être anticipées de six ou sept cents ans. L’Eglise se mit intrépidement à I’œuvre et elle les retarda de plusieurs siècles. Gardons-nous de nous en plaindre ».
« Nos pères étaient plus prévoyants que nous ; ils se croisaient contre les erreurs et, par là, ils s’épargnaient la croisade contre tous les excès qui naissent des erreurs. Nous, au contraire, nous nous croisons d’abord pour répandre toutes les fausses doctrines, sauf à nous croiser ensuite pour réprimer les résultats matériels de ces doctrines ».