Déclaration de la CEF :
La France va vivre une année électorale importante avec l’élection présidentielle et les élections législatives. À la veille de ce qui doit être un authentique débat démocratique, nous souhaitons appeler nos concitoyens à tenir compte de certains enjeux qui nous paraissent engager notre avenir de façon déterminante. Nous le faisons à la lumière de nos convictions enracinées dans la tradition chrétienne et des textes publiés par le Pape François au cours des années écoulées.
1. Démocratie et société de violence
La pratique démocratique établit des règles de débat qui permettent de confronter des convictions et de choisir pacifiquement entre différents projets de société. Quand la vie démocratique tombe dans le discrédit ou l’impuissance, les intérêts particuliers et les groupes de pression s’habituent à user de leurs moyens de contrainte pour forcer les responsables politiques à satisfaire leurs demandes. L’excès de lois trop circonstancielles émousse la force de la loi et le respect qui lui est dû. On s’efforce de dénier les procédures démocratiques pour obtenir par la contrainte, ou même la violence, ce que l’on n’a pas obtenu dans les urnes.
Si nous voulons progresser dans les pratiques démocratiques, nous devons promouvoir l’exercice du droit de vote en développant dans la société un véritable débat qui échappe aux postures, aux « petites phrases » et aux ambitions personnelles.
Le jeu médiatique, établi sur la mise en valeur excessive de la polémique et de la dénonciation, focalise l’attention générale sur des conflits de personnes ou des ambitions particulières en négligeant les convictions et les propositions argumentées. Il fait apparaître les projets et les candidats comme un jeu de rôles dans lesquels les enjeux ne sont présentés que comme des prétextes. Il ne favorise pas la confrontation pacifique, mais en développant la violence verbale, il contribue à développer une sorte d’hystérie de la vie publique.
Pour favoriser un véritable débat national, la campagne électorale à venir devra éviter les risques de crispations identitaires tout en faisant droit au fait national : nos racines, notre culture, notre patrie avec son histoire, ses responsabilités et ses atouts, la place et l’importance du fait religieux et des religions.
2. Pour un projet de société
Le débat démocratique n’est pas une fin en soi. Il est au service de la confrontation entre des opinions et des projets. Il doit donc être une occasion d’expliciter quel projet de société nous voulons soutenir et promouvoir. Trop souvent les critères mis en avant se limitent à envisager et exprimer les données économiques, comme si l’économie était le seul facteur de construction de la qualité de la vie humaine, personnelle et collective.
L’être humain est plus qu’un élément du processus économique. Les progrès technologiques et économiques doivent être au service du bien de tous et non seulement du profit de quelques-uns. C’est donc vers une économie du partage que nous devons avancer, vers un partage plus équitable du travail et des fruits du travail.
La qualité humaine d’une société se juge aussi à la manière dont elle traite les plus faibles de ses membres : ceux qui sont laissés au bord du chemin de la prospérité, personnes âgées, malades, personnes handicapées… Nous ne pouvons être indifférents à aucune victime de notre société. Nous sommes responsables du respect de toute vie de son commencement à sa fin.
3. Vers un pacte éducatif
Ces progrès de la pratique démocratique vers une vie sociale paisible et plus fraternelle passent, nous le savons tous, par une meilleure qualité de l’éducation des jeunes. Cette amélioration toujours nécessaire repose sur la qualité de la scolarisation qui est trop souvent soumise à des réformes auxquelles on ne donne pas le temps de porter leurs fruits et sur lesquelles on ne fait que trop rarement une véritable évaluation. Mais surtout elle passe par une confiance à rétablir entre les familles et l’école.
Pour le bien des enfants, c’est un véritable pacte éducatif qui doit unir les familles et l’école, non une concurrence, moins encore une méfiance. Toutes les dispositions législatives ou réglementaires qui affaiblissent la stabilité des familles et les moyens d’exercer leurs responsabilités ne peuvent jamais être compensées par une exigence incantatoire envers l’école. La marginalisation d’un nombre croissant de familles, les mesures qui brouillent la filiation, celles qui favorisent les divorces et l’éclatement des familles sont payées très cher par leurs premières victimes : les enfants. On ne peut pas espérer faire progresser la cohésion sociale en négligeant son tissu nourricier qui est la cohésion familiale. Les liens entre l’éclatement des familles, l’échec scolaire, la marginalisation des jeunes, parfois jusqu’à la délinquance, sont avérés, même si nous ne souhaitons pas le reconnaître. Les travaux du synode des évêques sur la famille, repris par le Pape François dans l’Exhortation Apostolique Amoris laetitia (La joie de l’amour), rappellent combien une famille unie est une ressource pour l’avenir et une espérance pour le bien de tous.
4. Solidarité
Une société vivante ne peut pas être la simple addition d’intérêts ou d’accords particuliers. Elle repose nécessairement sur la recherche du bien commun et la mise en œuvre de moyens de solidarité efficace. C’est une des grandes responsabilités de l’État d’organiser cette solidarité, surtout dans les périodes de grandes difficultés économiques. Partager dans les périodes d’opulence peut paraître relativement indolore : il ne s’agit que de distribuer le superflu. Dans les périodes de restriction, il s’agit de partager en prenant sur le nécessaire.
Dans notre société, l’écart entre ceux qui peuvent compter sur la sécurité et ceux qui sont plongés dans la précarité ne cesse de s’accroître. De plus en plus de nos concitoyens ne peuvent plus bénéficier du droit au travail. Il est illusoire de penser que des indemnités financières peuvent compenser cette carence. La fragilité de l’emploi suscite des crispations de la part de ceux qui jouissent d’un emploi garanti et d’avantages sociaux assurés. La défense des droits acquis se substitue à la volonté de partager et d’intégrer de nouveaux bénéficiaires. Les plus jeunes sont les premières victimes d’un système inégalitaire. Pourtant beaucoup d’entre eux attendent d’être appelés pour prendre leur place dans notre société.
Alors que le dynamisme économique suppose des encouragements durables à l’initiative et à la prise de risque, l’État doit gérer positivement la tension entre un libéralisme sans contrôle et la sauvegarde des mécanismes de protection sociale (assurance maladie, retraite, chômage, etc.). Cet objectif doit nécessairement ressortir des projets soumis au vote des citoyens.
5. Migrants
Dans une époque où les distances et les frontières s’effacent devant la mondialisation économique et culturelle, notre volonté de solidarité ne peut pas s’enfermer dans le cadre restreint de notre pays. Les événements dramatiques qui frappent les populations du Moyen-Orient ou d’Afrique jettent sur les routes et sur la mer des centaines de milliers de réfugiés, véritables naufragés humains. Quand la Jordanie et le Liban reçoivent des millions de réfugiés, comment notre pays pourrait-il reculer devant la perspective d’accueillir et d’intégrer quelques dizaines de milliers de ces victimes ?
Mais plus largement que l’accueil des réfugiés, nous devons nous interroger sur la manière dont nous traitons des migrants arrivés dans notre pays depuis plusieurs années. Est-il aujourd’hui tolérable que des milliers d’hommes de femmes et d’enfants vivent sur notre territoire dans des conditions trop souvent inhumaines ?
Une volonté d’intégration ne peut se réaliser sans accompagnement des ruptures culturelles. La seule recherche de solutions économiques est vouée à l’échec si rien n’est entrepris pour la promotion culturelle, promotion d’une culture enracinée, qui donne ou redonne le sens d’une vie collective nationale.
6. Europe
Nous sommes bien conscients que la France, à elle seule, ne peut solutionner ces situations dramatiques. Nous ne pouvons contribuer à les soulager que dans le cadre de la solidarité européenne. D’une certaine façon, notre vieille Europe joue son avenir dans la manière dont elle réagit. Soit elle nourrit l’illusion de pouvoir barrer la route à toutes les misères pour protéger sa relative prospérité, soit elle s’engage courageusement dans des politiques d’accueil.
L’accueil serait aussi une illusion s’il ne s’accompagnait pas de véritables programmes de soutien dans les pays d’origine des migrations : soutien économique et soutien politique pour lutter contre la misère endémique et les procédés antidémocratiques de certains gouvernants. Cette lutte doit suivre les engagements internationaux pris pour l’aide au développement et peut conduire à des interventions dans différents pays, comme la France l’a fait au cours des années écoulées.
Mais le projet européen ne peut se poursuivre ni se développer sans une véritable adhésion des peuples d’Europe. Cette adhésion suppose de respecter davantage le fait historique et culturel des nations qui composent le continent. Une véritable pratique de la subsidiarité, telle qu’elle est inscrite dans ses textes fondateurs, serait une nouvelle chance pour l’Europe.
7. Ecologie
Il y a à peine un an, la tenue en France de la Cop21, nous sensibilisait à notre responsabilité commune envers l’humanité. Le Pape François nous a rappelé gravement cette responsabilité dans l’encyclique Laudato si. L’enjeu écologique n’est pas simplement une vision naturaliste du monde, c’est une prise de conscience morale des risques de déséquilibre climatique et économique que court la planète. Responsables de la « maison commune », il nous faut mieux tenir compte des dégâts que provoque une société tout entière fondée sur l’augmentation de la consommation. Nous avons la charge d’un monde qui a ses limites et nous ne pouvons pas l’épuiser comme s’il était sans limites. La sagesse nous invite à revoir nos modèles de consommation et à inventer un monde moins destructeur et plus juste.
Devant les défis auxquels notre société est confrontée, le risque principal serait de renoncer à lutter pour l’avenir et de céder à la tentation du fatalisme. Trop de nos concitoyens en sont arrivés à croire que la situation est bloquée et que personne n’est capable de la débloquer. Les ressources de notre pays, ressources économiques, humaines, culturelles et spirituelles nous permettent de rejeter ce fatalisme. Elles engagent chacun et chacune à exercer son discernement et sa responsabilité pour le bien de tous.
Pour celles et ceux qui ont foi en Dieu et qui vivent dans la communion au Christ, les difficultés que nous rencontrons ne sont pas un appel au renoncement. Au contraire, elles nous acculent à investir toutes nos capacités pour construire une société plus juste et plus respectueuse de chacun. Cela s’appelle l’espérance.
Le Conseil permanent de la Conférence des évêques de France
Mgr Georges PONTIER, Archevêque de Marseille, président de la CEF
Mgr Pierre-Marie CARRÉ, Archevêque de Montpellier, vice-président de la CEF
Mgr Pascal DELANNOY, Évêque de Saint-Denis, vice-président de la CEF
Cardinal André VINGT-TROIS, Archevêque de Paris
Mgr Jean-Claude BOULANGER, Évêque de Bayeux et Lisieux
Mgr François FONLUPT, Évêque de Rodez
Mgr Hubert HERBRETEAU, Évêque d’Agen
Mgr Jean-Paul JAMES, Évêque de Nantes
Mgr Stanislas LALANNE, Évêque de Pontoise
Mgr Benoit RIVIÈRE, Évêque d’Autun, Chalon et Mâcon
Quel baratin!
Mais en outre, il y a plus grave que le baratin, à savoir une très grave omission, celle de l’absence de toute référence aux principes non négociables, en tout cas à, celui qui se rapporte au respect qui est dû au mariage, comme union de l’homme et de la femme, et aux lois naturelles, selon lesquelles il y a une différence entre l’homme et la femme. Faute de ce respect on est conduit à accepter de priver des enfants de père ou de mère.
A propos de ce sujet, qui sera, on le sait déjà parfaitement, l’un des sujets phares du débat public autour des élections ( revenir ou non sur la loi Taubira …), nos évêques devraient, pour le coup, avoir une certitude sur ce qu’appelle le bien commun. Ne pas en dire un mot, de la part des évêques, est, à contrario, donner à penser qu’ils n’ont pas de certitude sur le sens du bien commun en la matière, et donc que soit ils ont perdu la foi en la vérité de la Révélation, soit ils n’osent pas dire ce en quoi ils croient.
Dans un cas comme dans l’autre, le mieux qu’ils auraient à faire est évidemment de se taire. Puisque s’ils parlent, c’est avec comme effet d’induire en erreur, de manière scandaleuse au sens propre du terme.
Qu’il est loin le temps de Benoit XVI qui avait introduit avec tant de pertinence la notion de principes non négociables en politique, en précisant que, pour un homme politique, promouvoir une réforme transgressant un principe non négociable, c’est commettre une faute très grave. A l’époque, de hauts responsables de la hiérarchie ecclésiale en France n’avaient pas craint de braver l’autorité de Benoit XVI en déclarant nulle et non avenue l’idée des principes non négligeables en politique. Ils ont contribué ainsi objectivement à l’élection de François Hollande et par suite à l’advenue d’une loi permettant de priver des enfants de père ou de mère.
Eh bien, nos évêques remettent ça. La gravité de la faute correspondante leur avait pourtant été véhémentement signalée à l’époque! Ils sont décidément incorrigibles.
Levons-nous, tous ceux qui ont un esprit droit et honnête, unissons-nous pour tenter de diminuer leur nuisance, particulièrement en cette période d’élections dans laquelle nos évêques ont l’air bien partis pour pousser le pays toujours plus loin vers l’erreur, nécessairement préjudiciable au bien commun….
Ce communiqué donne autorité religieuse à des thèses controversées comme le réchauffement climatique. Ce n’est pas le rôle des évêques de ne pas respecter la laïcité et sa liberté.
Naturellement pas un mot sur les grands exclus de la vie: les fœtus. Pas un mot sur le droit à la vie des grands handicapés, pas un mot sur l’euthanasie (euta-nazie disent certains), pas un mot sur la marchandisation de l’être humain qui ne peut faire l’objet de vente, ni de don.
Mis à part ces oubliés de l’épiscopat, il y a des passages instructifs comme par exemple:
« Le jeu médiatique, établi sur la mise en valeur excessive de la polémique et de la dénonciation, focalise l’attention générale sur des conflits de personnes ou des ambitions particulières en négligeant les convictions et les propositions argumentées. Il fait apparaître les projets et les candidats comme un jeu de rôles dans lesquels les enjeux ne sont présentés que comme des prétextes. Il ne favorise pas la confrontation pacifique, mais en développant la violence verbale, il contribue à développer une sorte d’hystérie de la vie publique. »
Il est vrai que l’édification vaut mieux que la dénonciation. Pourtant le communiqué des évêques même s’il parle de “bien commun” ne rappelle pas que ce bien commun, ce sont avant tout des valeurs portées par la raison universelle de l’homme: vérité, justice, dignité de l’homme. Il reste muet sur le chapitre de la dignité de l’homme. L’homme détient une dignité inamissible (qui ne peut lui être ôtée) parce qu’il est appelé à vivre dans l’au-delà par un Dieu qui l’aime et Qui le veut pour Lui. Cette dignité est la clé de voute de la société politique. Créé pour les autres, l’homme est fait pour la société, c’est vrai ; mais en même temps et surtout, sa destinée personnelle dépasse cette vie.
Nous restons, hélas, à un niveau terrestre. Le communiqué ne parle même pas de la fraternité (Mt 2,8), valeur de foi chrétienne et inscrite dans la devise de la France.
Chers évêques ! Parlez-nous de Dieu et de notre destinée qui est de vivre pour toujours avec Lui ! C’est la clé de voute rationnelle de tout l’édifice politique.
Et moi qui pensais jusque-là que l’espérance chrétienne, c’était d’être élevé à un niveau surnaturel me permettant de voir Dieu et d’en retirer une joie parfaite, je me faisais un film !
je n’ai pas changé…vieux refrain toujours à la mode depuis 1945 l’épiscopat fait voter à gauche ou au centre gauche Pas un mot sur les obligations de la morale chrétienne mais une tartine écolo qui s’abstient de donner les points non négociables !
Rien sur la défense de la famille? Pour la défense de la vie juste évoqué, sans outre précision…
Un texte très décevant, au fond assez lâche. Rien sur le respect de la vie, de la conception à la mort naturelle, sur la maîtrise des progrès techniques (où le progrès nous mène-t-il ?), rien sur l’importance de la famille (ont-ils lu Amoris laetitia ?) fondée sur l’amour d’un homme et d’une femme.
Les instances épiscopales prennent de risque de déclencher, contre elles, comme un populisme des catho de base tant ils sont pris dans leurs appareils, dans un establishment sans goût ni gounache…
Dieu vous garde
Catéchisme républicain !..
Une Parole du Christ aurait suffi.
Cette lettre démontre une fois encore qu’une fraction des évêques de France ne prend pas vraiment la mesure de ce qui se passe aujourd’hui dans nos pays.
Le paragraphe 5 sur les migrants est à cet égard éloquent d’aveuglement et de contre-sens.
1/ Dans la proportion de neuf sur dix, ceux qui arrivent ici ne sont pas des réfugiés mais des migrants envahisseurs attirés par un train de vie plus confortable et des aides en tout genre.
2/ Dans la proportion de huit sur dix, ceux qui arrivent ici sont des musulmans bien décidés, même si c’est parfois de façon subliminale, à implanter, à développer, à faire dominer enfin, leur religion, au détriment de son ennemi de toujours qui est le christianisme.
Leur ouvrir les bras, c’est condamner à plus ou moins brève échéance le christianisme à vivre dans la dhimmitude puis à disparaître progressivement.
À ces quelques évêques ignorants, on ne peut que conseiller de regarder ce qui s’est produit au cours des siècles en Syrie, en Palestine, en Mésopotamie, en Egypte, en Turquie, en Afrique du Nord, tout récemment à Chypre et dans la partie occidentale de la Nouvelle-Guinée.
À ces évêques ignorants, on ne peut que suggérer de regarder les pays où les chrétiens sont persécutés : tous sont des pays musulmans, plus ceux qui le sont en partie comme le Nigeria ou encore les Philippines ou encore le Moyen-Orient.
À ces évêques pusillanimes, on ne peut que conseiller d’adopter une attitude favorable aux chrétiens, favorable au catholicisme, en fin de compte favorable à l’Evangile et au Christ dont ils sont (devraient être ?) les propagateurs et les disciples.
Et s’ils n’en ont pas le courage, alors qu’ils nous épargnent ces “déclarations” et qu’ils se taisent !
Une nouvelle bouillie prêchi-prêcha purement naturaliste mais sans rappel de la loi Naturelle (Famille) et surtout Surnaturelle. Épiscopat mithridatisé par la société laïcisée, incapable de prédication, paralysé par le respect HUMAIN. “Humain trop humain” !
Comme d’habitude …..on pourrait l’écrire à leur place.
Pas un mot sur le respect de la vie, pas un sur le respect dû aux femmes, pas un sur l’horreur du gender.
Des collabos !
Je suis malheureusement entièrement d’accord avec tous les commentaires attristés qui ont accueilli sur votre site cette déclaration, et naturellement avec les plus développés, ceux de Marie, de Denis Merlin, d’Hervé Soulié.
Oui, on peut hélas constater que Nos Seigneurs les Évêques, ou tout au moins ceux qui ont la main sur “l’Église qui est en France”, sont beaucoup plus doués pour le “baratin” que pour la direction des âmes qui leur sont confiées. Leur texte compte plus de 1.700 mots dont quelques dizaines, à peine, sont pertinents.
De nos évêques, nous attendons pourtant qu’ils nous disent clairement sur quels critères nous devrions voter au printemps prochain : non pour nous pousser à voter pour tel ou tel candidat, mais pour que nous sachions ce qui doit nous interdire de voter pour ceux dont les projets sont mortifères, et ce qui doit nous inviter à apporter notre voix à d’autres candidats qui ont l’intention de respecter, dans leur programme, la loi naturelle et la loi divine.
Or, il faut scruter ce texte pour y découvrir quelques timides allusions à de tels critères, d’ailleurs présentées sans que leur importance respective soit si peu que ce soit indiquée.
Faut-il penser, par exemple, que la croyance en la nocivité de l’action humaine sur l’équilibre de la nature et de la nécessité d’y porter remède, qui fait l’objet de deux longs paragraphes, est un critère beaucoup plus important que le « respect de toute vie de son commencement à sa fin », expédié en dix mots à la fin d’un long développement sur un « projet de société ». Le Seigneur est-il plus gravement offensé par un appartement inutilement surchauffé que par un avortement ou une euthanasie ?
Le paragraphe concernant les migrants est particulièrement navrant, pas seulement et pas tellement parce qu’il voudrait imposer à nos concitoyens une charge sans doute trop lourde, que parce qu’il témoigne d’une incroyable ignorance de ce qu’est un réfugié. Il se trouve que j’ai de bonnes raisons de le savoir, car ma mère, enfant, a dû fuir la Russie soviétique avec ses parents, pour sauver leurs vies ; jusqu’à son mariage avec mon père, qui lui a donné la nationalité française, elle a été apatride, vivant sous la protection (d’ailleurs efficace) d’un passeport Nansen [*] ; ni mes grands-parents, ni elle-même, n’ont jamais revu leur pays. Et quant à moi, j’ai, comme beaucoup de Français, été, à l’âge de sept ans, réfugiée dans une province lointaine, ayant dû fuir l’avancée des troupes allemandes.
Je suis donc bien placée pour savoir qu’un réfugié, c’est une personne qui a dû fuir sa maison et souvent son pays pour échapper à un danger mortel ou ressenti comme tel. Il n’a qu’un désir : revenir chez lui dès que possible, même si c’est pour trouver détruit tout ce qu’il aimait, et se mettre à reconstruire.
Il est donc aberrant, s’agissant des véritables réfugiés, de s’obliger à les « intégrer », c’est-à-dire à renoncer à ce retour chez soi.
Quant à ceux, apparemment les plus nombreux parmi les migrants, qui ont quitté, à grands frais, leur pays certes pauvre mais relativement en paix parce qu’ils espéraient trouver en Europe des conditions matérielles meilleures, et à ceux qui, venus des pays en guerre, sont de véritables déserteurs partis en laissant sans défense de nombreuses familles dont la mère reste seule pour faire survivre ses enfants, nous n’avons envers eux pas d’autre obligation que celle de leur venir en aide, temporairement, s’ils se trouvent sans toit, sans nourriture ou sans soins médicaux nécessaires, mais certainement pas celle de les « intégrer ».
[*] Qui permettait à ses titulaires, pourvu qu’ils n’aient pas l’imprudence de se rendre dans leur pays d’origine ou dans un pays idéologiquement trop proche de celui-ci, de voyager librement dans le monde entier.