L’annonce d’un nouveau sacre par Mgr Williamson n’a guère défrayé la chronique. Nous sommes bien loin des conditions climatériques de juin 1988. Il n’y a nul buzz, pas même dans la cathosphère. Mais il y a surtout le constat de conséquences patentes d’un isolement. Un observateur constate le danger d’une institutionnalisation des mesures d’exception. Dans un post écrit sur le Forum catholique, il évoque le danger d’une lignée semblable à la “lignée Thuc”. En effet, Mgr Ngo Dinh Thuc est un évêque vietnamien qui a sacré plusieurs évêques sans mandat pontifical, au cours des années 1970. Certains de ces évêques ont fini par créer des groupes sectaires. N’est-ce pas le danger qui guette cette lignée inaugurée par Mgr Williamson ? Comment concevoir que Dom Thomas d’Aquin, vu l’état d’enfermement psychologique dans lequel il végète avec son groupe, se réconcilie avec Rome et “remette” son épiscopat au pape ? Au passage, Dom Thomas d’Aquin n’aura cessé de se battre contre ses “amis”: en 1988, contre Dom Gérard, au sujet du “ralliement” du Barroux; en 2002, contre Mgr Rifan, concernant la “chute” de Campos; depuis 2013, contre le supposé “ralliement” de Mgr Fellay. Bientôt, le futur évêque sera-t-il en lutte contre lui-même ? La tendance à l’émiettement des différentes aventures schismatiques infirme difficilement ce constat d’éclatement…
Comme l’écrit l’auteur de ce post, “Mgr Williamson, pourtant plus brillant que ceux qui l’entourent, devient prisonnier de ce microcosme où il finit par trouver des candidats à l’épiscopat.”
Il est fort regrettable que des personnes ayant eu la générosité d’offrir un jour leur vie en viennent à perdre tout crédit par une action désordonnée. Comment ne pas faire le rapprochement entre ces sacres à dates rapprochées, qui sont annoncés quelques jours auparavant (alors qu’aucun besoin précis ne se manifestait publiquement) et l’attitude quelque peu excentrique de Mgr Ngo Dinh Thuc qui finissait par conférer l’épiscopat de façon éparse à des amis ? Il est tentant de se demander qui sera l’heureux élu du 19 mars 2017 ? Du 19 mars 2018 ? Il est une habileté de notre ennemi commun que de vouloir singer des actes héroïques. Le 30 juin 1988 est manifestement singé. L’accoutumance finit par institutionnaliser des mesures d’exception et par banaliser des actes graves, les vidant de toute leur légitimité. Il y a fort à craindre que dans quelques temps l’usage conduise à parler de « lignée Williamson » comme il était de coutume de désigner l’existence d’une « lignée Thuc ».
Ce qui est certain, c’est que Mgr Lefebvre en son temps ne se serait jamais permis de procéder aux sacres si à travers le monde il existait des évêques de la trempe de NN.SS. Fellay, de Galarreta, Tissier de Mallerais et même de Mgr Schneider. Ces hommes défendent la messe traditionnelle, prêchent la foi dans son intégralité et son intégrité, soulignent les méfaits des dérives de l’aggiornamento. Seule une idéologie aveuglée permet de les faire passer pour des modernistes et d’invoquer une nécessité. D’ailleurs le recours à la comparaison du « ver de terre », comme le fait Mgr Williamson à l’égard d’un de ses anciens confrères, afin d’asseoir quelque argument, ne fera probablement pas entrer son texte dans l’histoire… Sans doute l’évêque britannique, décrié par quelques-uns de ses amis « résistants », s’offre-t-il la possibilité de retrouver une nouvelle virginité au sein d’une nébuleuse animée par une spirale révolutionnaire : sans véritable chef et vouée à la vindicte de quelques censeurs qui prêchent toujours davantage de « pureté » dont ils sont les propres garants, ils récusent toute idée de nuance ou de discernement. Mgr Williamson, pourtant plus brillant que ceux qui l’entourent, devient prisonnier de ce microcosme où il finit par trouver des candidats à l’épiscopat. Il n’est pas certain que cet univers partiellement vagus lui soit éternellement fidèle. Néanmoins, le diable porte pierre et l’aspect bénéfique de ce drame est que ce mouvement résistant s’enfonce à marche forcée vers la caricature. Une telle dérive ne peut que vacciner les esprits hésistants. Ce fut en leur temps les principaux enseignements des déroutes de Mgr Thuc ou de Palmar de Troya.
Ce commentateur est prisonnier de ses catégories. Les “brillants” (sic) et les pas brillants. Cela l’empêche de réfléchir librement à la situation. Il aliène son esprit aux esprits “brillants”. Misère !
Quelle différence entre Mgr Williamson et Mgr Fellay ? Du point de vue canonique aucune. La seule différence c’est que l’un discute avec le pape et l’autre non, mais ce n’est pas une différence canonique.
La discussion avec le pape a, certes, incité ce dernier à donner juridiction provisoire aux prêtres de la FSSPX. Mais cela ne confère finalement pas une situation canonique substantiellement différente aux williamsonniens de celle des lefebvristes auto-proclamés authentiques.
Au lieu de tirer à boulets rouges sur Mgr Williamson, il y aurait intérêt à réfléchir au pourquoi du sédévacantisme.
Pourquoi le sédévacantisme ? D’abord la négation de la liberté religieuse dans l’Église par le pape Paul VI et ses successeurs. La haine et le mépris que le haut clergé affichait pour “les intégristes” dans les années 60 et 70 (schismatiques, hérétiques, hypocrites, vous allez en enfer) d’abord est une cause de la situation actuelle. Le haut clergé est et reste indifférent aux droits culturels du peuple (voir Gaudium et spes). La tyrannie cléricale déchaînée détruisait la culture religieuse avec une bonne conscience sans faille: “Je suis avec le pape, moi, monsieur ! Je fais partie des meilleurs, sales Pharisiens que vous êtes !” Moyennant quoi on interdisait sous peine de péché les rituels traditionnels que l’on reconnaît comme parfaitement valables et licites aujourd’hui (voir le motu proprio du 7/7/7 qui tente d’interdire – et non autorise – l’usage du missel de saint Pie V). Le problème reste pratiquement entier, même si les insultes et les menaces ont été “laissées au vestiaire” (selon le mot du général de Gaulle) en entrant dans la salle de négociation.
Du côté lefebvriste, je vois des prises de position absurdes (par exemple contre la liberté religieuse), des admirations sans borne pour des textes sans intérêt, une culture défaillante, des critiques des textes de Vatican II à l’inverse de la vérité et des droits des… lefebvristes !
Finalement la prose de ce commentateur c’est l’hôpital qui se moque de la Charité. C’est un professeur de morale qui critique âprement la position qu’il occupe. C’est finalement dans la même veine que faire usage de sa liberté religieuse pour critiquer cette donnée de la raison universelle de l’homme.
Je les aime bien les sédévacantistes, même si leur position intellectuelle est intenable (car l’Église n’est pas un dû, mais une miséricorde divine). Qu’au lieu de les critiquer, de les insulter de les menacer de l’enfer, on commence par leur reconnaître la liberté religieuse. Au lieu de taper sur leurs plaies, et de se réjouir de leur détresse, qu’on essaie de comprendre ce qu’ils disent et qu’on reconnaisse et respecte leurs droits, y compris dans l’Église !
Monsieur Merlin on voit que vous en connaissez pas la doctrine de l’Eglise. Relisez les encycliques des papes jusqu’à Pie XII inclus. Vous verrez bien que ces textes condamnent tous la liberté religieuse, le libéralisme, le modernisme, l’œcuménisme. Mais pour vous ce sont des textes “sans intérêt” !!! Quel mépris pour le Magistère de l’Eglise.
Les “lefebvristes” n’existent pas. Les fidèles de la Fraternité St Pie X (je suppose que ce sont eux que vous appelez “lefebvristes”) sont catholiques, Point.
Enfin ne comparez pas les actions délirantes de Mgr Williamson avec la Fraternité St Pie X. Mgr Williamson prend ses initiatives seul et n’a plus rien à voir avec la Fraternité St Pie X.
Au lieu de procéder par affirmations péremptoires et lancer de très graves accusations, veuillez citer les textes qui condamnent la liberté religieuse.
Le Syllabus ? Il est fondé sur elle !
Et vous à quel titre parlez-vous ? Au titre de votre croyance en la supériorité de votre science ? Non, vous écrivez et parlez au titre de la liberté religieuse. Mgr Fellay et Mgr Williamson agissent au nom de leur liberté religieuse.
Mgr Lefebvre n’a pas sacré d’évêques seul, mais avec Mgr de Castro-Mayer et, surtout, ils ont avant les sacres diffusé un texte assez long dans lequel ils donnaient les bases canoniques et théologiques de leur décision en délimitant clairement les bornes de la juridiction des évêques nouvellement sacrés et, par là-même, celles des prêtres exerçant comme prieurs. Ce texte, qui a été utilisé pour sacrer le successeur de Mgr de Castro Mayer, don Licinio (sacre organisé par Mgr Lefebvre et Mgr de Castro Mayer avant leur mort), a eu des conséquences profondes sur les communautés FSPX et les a encore plus solidement ancrées dans la communion avec Rome. Quand aux sédévacantistes, ils font passer le droit canon avant la théologie et peuvent avoir juridiquement raison quand ils ont théologiquement tort. Enfin, Mgr Willimason dont le tropisme américain est fort et qui joue la ressemblance avec Clint Eastwood, ressemble aujourd’hui à un outilparmi d’autres des milieux WASP pour contrer l’Eglise en Amérique latine, un peu comme Plinio Correa da Oliviera et sa secte TFP. Quand au pauvre père Thomas d’Aquin, sa faiblesse intellectuelle le rapproche de plus en plus du pantin. Il est le digne représentant d’une bourgeoisie cariocas qui vit encore aujourd’hui dans le regret du bon temps de l’esclavage avec messe des riches et des blancs au couvent, et messe des pauvres et des noirs dans une chapelle située en surplomb du monastère.
J. V. DE GROOT O.P. Summa Apologetica de Ecclesia Catholica, Ratisbona, Institutum Librarium pridem G.J. Manz., 1906, p. 184 a écrit:
Afin que [la succession Apostolique] soit légitime il est nécessaire qu’il y ait une succession formelle et non seulement une succession matérielle .
R.P. Goupil, La Règle de la Foi, p.24 a écrit:
[L]es Apôtres qui ont reçu la charge et le pouvoir d’enseigner, les ont transmis à leurs légitime successeurs,qui font avec eux une même personne juridique.
Joseph Falcon, S.M., LA CRÉDIBILITÉ DU DOGME CATHOLIQUE, apologétique scientifique, p.496, Émmanuel Vitte, 1948 a écrit:
L’Apostolicité.
[…] Mais, en tant que note, l’Apostolicité est seulement : l’identité d’une Église avec l’Église des Apôtres sous le rapport de la JURIDICTION.
Naz, Traité de Droit Canonique, t.I, p.443 a écrit:
L’Eglise a insisté depuis longtemps sur cette obligation d’exhiber les lettres pontificales. Le motif en est déjà indiqué par Boniface VIII (1294-1298) : On ne doit pas ajouter foi à celui qui affirme qu’il vient avec mandat du prince, à moins qu’il en donne la preuve écrite.
Il faut reconnaître que Mgr Williamson est brillantissime ! Même si l’on ne parage pas tout ce qu’il dit, il faut admettre qu’il y a dans ses lettres hebdomadaires de véritables perles, que l’on aurait tort de se priver de lire.
Pour l’avenir ? Son mouvement va-t-il devenir sectaire ? Quelle va être l’évolution de l’Eglise officielle avec ce Pape bizarre ? Quelle sera la position des instituts traditionnels (FSP, ICRSP, Fontgombault, Lagrasse,…) si çà déconne du côté “officiel” ? Quel est l’avenir de la FSSPX qui semble bizarrement se rapprocher de Rome alors que le Pape est plus ambigü encore que son prédécesseur ? Bien malin qui peut humainement le dire à cet instant. Une chatte n’y retrouverait pas ses petits. En ce qui me concerne, je me tiens au courant de tout ce qui se dit et se fait dans le monde éclaté de la catholicité, assez peu je dois l’admettre dans mon diocèse que je considère en faillite et dans le milieu sédévac dont je trouve les positions intellectuellement peu tenables. Après tout le principal est de se former dogmatiquement et doctrinalement, et de prier beaucoup…
Bonjour Franz,
merci pour les moments de bonne humeur, ça fait toujours du bien ! J’ai lu votre texte machinalement jusqu’au moment où je suis arrivé à “encore plus ambigu que son prédécesseur” (Benoit XVI). Et là j’ai éclaté de rire.
Merci mon frère,
PS : si la situation vous parait inextricable, c’est peut-être que le problème est mal posé ? ceci dit sans vouloir vous offenser – c’est une phrase de ma prof de math, rien de religieux dans le propos.
à Merlin : comment ça le motu proprio du 7/7/7 tente d’interdire la messe de St Pie V ? Conditionner de manière moins stricte que les textes antérieurs (1984, 1988) Est-ce interdire ? Franchement non. D’autant que toute action liturgique n’est autorisée par le Siège apostolique que dans des circonstances précises. C’est évidemment nécessaire…
Lisez bien cher fd. Le motu proprio constate que l’usage des rituels anciens est licite et que le pape actuel (,ni aucun pape selon moi) ne peut les interdire. Cet usage est protégé par la liberté religieuse. Donc l’usage du missel de saint Pie V est licite. Oui, mais, le motu proprio prétend que les fidèles ayant accepté “volontiers” le missel de Paul VI, que donc, il interdit en général l’usage du missel de saint Pie V et ne l’autorise que dans des circonstances particulières. Il s’est trouvé un titre à l’adoption obligatoire du missel de Paul VI (alors que l’usage de ce missel est possible en vertu de la liberté religieuse, hier, aujourd’hui et demain et pour tout catholique ou acatholique).
Donc implicitement, il constate que les textes antérieurs (1984 et 1988) avaient été pris sans titre et qu’ils n’avaient aucune valeur juridique. Car le Saint-Siège n’a pas de titre à interdire l’usage d’un missel édité par un pape.
Mais selon moi le titre que se reconnaît Benoît XVI à l’interdiction n’existe pas car un texte de droit positif ne peut interdire une liberté de droit naturel. L’Église doit respecter le droit naturel. Ce que constate le motu proprio du 7/7/7 pour les rituels des sacrements.
Benoît XVI est un vieux matois, un roublard… Il doit bien rire dans sa barbe du bon tour qu’il a joué… Ceux qui ont compris se taisent et s’amusent de voir les lefebvristes lutter… conte leurs propres droits… Mais, lui, il a compris comment se posait le problème. Il l’a compris parce qu’il a visité les communautés traditionalistes et il a dû se dire “Comment leur interdire de prier avec un texte d’un pape ?” “À quel titre interdire l’usage de rituels autorisés et utilisés par des dizaines et des dizaines de papes ?” Benoît XVI est un homme très intelligent et très cultivé. J’enfonce des portes ouvertes, mais je crois que c’est intéressant de le rappeler à propos du motu proprio du 7/7/7 pour bien comprendre la porté de ce texte.
Donc les lefebvristes ont rendu un grand service à l’humanité et à l’exercice de la liberté religieuse… par les fidèles catholiques. Ils ont permis d’approfondir la réflexion sur la portée de la liberté religieuse dans l’Église. Lieberté religieuse violée par les papes depuis au moins Paul VI.
Pie XII, Décret de la Congrégation du Saint-Office concernant la consécration d’un évêque sans provision canonique, 9 avril 1951, Documents Pontificaux de Pie XII, 1951, p.123 a écrit:
Tout évêque, de n’importe quel rite ou dignité qui sacre un évêque sans que celui-ci ait été nommé par le Siège apostolique, ni confirmé expressément par celui-ci, ou s’il reçoit la consécration, MÊME SOUS UNE CONTRAINTE GRAVE , encourt par le fait même, l’excommunication réservée tout spécialement au Siège apostolique.
« Etablie par Dieu et chargée d’une mission déterminée, d’après l’économie de ses desseins, l’Église apparaît comme un organisme nécessaire dans le plan divin. Cette necessité suppose que Dieu a pourvu l’Église de tous les éléments indispensables à sa subsistance et à l’accomplissement de sa mission.
Or, pour subsister, l’Église, comme toute société, doit vivre dans l’ordre .
Naz, Traité de droit canonique, Letouzey et Ané Ed., 1946, T.1, introduction générale du droit canonique, page 14
Il est évident, d’abord, qu’on ne pourvoit pas aux besoins spirituels des fidèles en violant les lois de l’Église.
(Pie XII , Encyclique ” Ad Apostolorum principis” 29 juin 1958)
Nul catholique ne conteste au souverain Pontife son droit exclusif d’Institution canonique des évêques. « Dans l’Église catholique, enseigne Pie VI, il ne peut plus y avoir de consécration légitime, que celle qui est conférée par un mandat apostolique. » (Bref Charitas, du 13 avril 1791.) C’est la Foi.
Mais pour l’intégrité de la doctrine, peut-on s’arrêter là? Quelques-uns l’ont pensé. D’autres ont jugé devoir pousser ultérieurement leurs recherches, et affirmer que l’Institution canonique conférée par le Pape n’est pas une simple désignation ou ratification de la personne élue, mais qu’elle est une véritable collation de puissance et d’autorité ; en sorte que la juridiction de l’Évêque élu lui arrive du souverain Pontife comme de sa source. En deux mots ils disent ; la juridiction des Évêques découle immédiatement du Pontife Romain.
Comment peut-on justifier de passer outre ce qui est de foi?
Montrouzier, H. (S. J.)
Revue des sciences ecclésiastiques
Année 1871 page 539