Nous avions parlé de la commémoration du Holodomor (la grande famille ukrainienne de 1932-1933) qui devait s’achever par la célébration d’une Divine liturgie à la cathédrale Notre-Dame de Paris. L’Église grecque-catholique ukrainienne est très sensible à cet épisode de l’histoire de l’Ukraine. Voici l’homélie de Mgr Hlib Lonchyna, éparque grec-catholique ukrainien de Londres (éparchie de la Sainte famille de Londres), prononcée le dimanche 22 novembre 2015. Nous en reproduisons la partie française:
Chers frères et sœurs,
Tout le monde a été choqué par les événements tragiques d’il y a dix jours. Nous offrons nos prières pour les victimes innocentes, pour les âmes des défunts, pour les blessés, pour les familles en douleur. On cherche les raisons pour des choses qui n’en ont pas. Les attentats de Paris sont seulement le dernier cas dans une longue lignée de violence, de haine, de meurtre. Elle prend son début dans l’histoire de Caïn et Abel, et continue ininterrompue jusqu’à la crucifixion de Jésus, jusqu’à nos jours.
Aujourd’hui nous commémorons les victimes du Holodomor – la famine artificielle voulue par Staline pour collectiviser les paysans ukrainiens il y a quatre-vingt-trois ans, en 1932-33. Le régime soviétique a réquisitionné non seulement tout le grain que la terre noire de l’Ukraine a produit en abondance cette année-là en le vendant aux pays occidentaux, mais aussi toute forme de nourriture : fruits, légumes, viande, où qu’ils eussent été cachés. Les mères ont dû voir mourir leurs enfants devant leurs yeux, elles-mêmes ne pouvant pas les nourrir. Toute une génération d’ukrainiens a été mise à mort pour être enfin substituée par des populations, emmenées par la force pour repeupler les villages.
Aujourd’hui leurs descendants dans le Donbass doivent lutter dans une guerre nouvelle, non-déclarée, hybride. Quand le monde entier lutte contre le terrorisme international, la population de l’Ukraine orientale continue à être victime de la guerre oubliée.
Le poète ukrainien Taras Chevtchenko a écrit avec douleur :
“Pour qui as-Tu été crucifié,
Christ, Fils de Dieu?
Pour nous si braves,
ou bien pour un mot de vérité… ou bien
pour que nous Te tournions en dérision?
Hélas, ce fut ainsi.”
En voyant la violence du monde, on se rappelle les mots de Blaise Pascal : “Jésus sera en agonie jusqu’à la fin du monde”. Ces paroles jettent un peu de lumière sur ce mystère. En effet, dans sa crucifixion Jésus nous a tous portés, du commencement du monde jusqu’à la fin. Il nous a donné une signification, une raison, une explication. La violence peut éteindre une vie humaine, détruire nos institutions. Mais elle ne peut pas détruire l’amour avec lequel Dieu nous a créés. Les vainqueurs ne sont pas ceux qui ont la force d’armes ou de pouvoir, mais ceux qui ne permettent pas que la haine anéantisse la charité, la bonté, l’humanisme de la personne.
Cette une grâce, un don de Dieu, du Sauveur qui a vaincu la violence en s’abandonnant à la violence sans perdre la charité.
C’est donc dans ce même esprit que nous commémorons aujourd’hui les victimes de la violence humaine : du Holodomor, de la guerre oubliée en Ukraine, des attentats de Paris. La violence, la haine n’auront jamais le dernier mot ni la victoire. “Nous mettons notre espérance dans le Dieu vivant” (1 Tm 4,10). Il nous aidera à continuer à aller de l’avant, sans peur, avec la foi, dans la charité de Dieu.
(…)
Historiquement, on sait désormais que Holodomor n’est pas une famine créée ex nihilo, mais une aggravation des conséquences d’une famine par le pouvoir bolchevick. La précédente famine avait déjà fait trois millions de morts. Les Bolcheviks sont responsables d’un grand nombre de morts supplémentaires (1 à 3 millions ?).
Il est intéressant de constater que la célébration de Holodomor concerne quasi exclusivement les populations de l’Ukraine actuelle qui n’ont pas été touchées par cette famine et qui, pour l’essentiel, n’étaient pas ukrainiennes à l’époque. Il est possible que la récolte ait été bonne en Galicie en 1932 (cet évêque, qui représente l’Ouest de l’Ukraine actuelle, parle d’une récolte abondante), mais justement, la Galicie n’a pas connue la famine et n’était, de toute façon, pas encore ukrainienne.
Les propos de cet évêque sont intéressants car ils sont prudents et ambigus sur la guerre au Donbass. Cela nous éloigne des appels au meurtre du patriarche de Kiev et d’une grande partie du clergé galicien.
Vous voulez dire famine ?
merci pour cette publication ; la grande famine a été au même moment étendue à toute la Russie !