Mgr Jean-Paul James (ainsi que trois autres évêques français) a été élu père synodal. Avant son départ, il répond à quelques questions :
“Monseigneur, vous avez été choisi pour participer à la 14e Assemblée générale ordinaire du Synode des évêques; comment s’effectue ce choix et quel a été votre sentiment lorsque l’on a proposé votre nom?
L’assemblée du prochain synode des évêques est composée de différents membres : les conférences épiscopales les plus nombreuses élisent un ou plusieurs représentants et proposent ces noms au Pape. C’est ainsi que j’ai été désigné, avec trois autres évêques de France : le Cardinal Vingt-Trois, Mgr Pontier et Mgr Brunin. D’autres évêques sont désignés directement par le Pape : en France, c’est le cas de Mgr Ulrich, archevêque de Lille. A ces évêques, s’ajoutent des responsables, cardinaux ou évêques, des services de la Curie Romaine, des experts théologiens, des couples, des religieux. Sont également présents des représentants des différentes confessions chrétiennes. La participation à une telle assemblée est, pour moi, une expérience nouvelle : bien sûr, la démarche synodale est assez connue au sein d’un diocèse ; c’est par exemple, le cas, dans un conseil pastoral diocésain. Vivre ma mission en lien avec le collège épiscopal, est aussi une expérience connue dans la relation avec l’archevêque et les évêques de la Province de Rennes, et lors de l’assemblée plénière de Lourdes. Mais ici, il s’agit de vivre pendant trois semaines, de prier, de réfléchir, en présence du Successeur de Pierre et sous son autorité, avec des évêques représentant l’Eglise Universelle.
Comment appréhende t-on un tel événement ecclésial universel et comment s’y prépare t-on ?
Le prochain synode fait l’objet d’un intérêt plus grand que d’autres, du seul fait de son thème : tous ont une famille. Je relève d’abord l’attente, les espoirs parfois contradictoires de beaucoup de catholiques, pratiquants réguliers ou de culture chrétienne, par rapport à cette assemblée synodale. Pour s’y préparer, le Pape François a voulu une démarche nouvelle. Ce synode fait suite à celui qui s’est déroulé sur le même thème, l’année dernière. Entre les deux, il a souhaité une consultation large du Peuple de Dieu. La première préparation, c’est d’écouter, de lire, ce qu’ont pu dire ou écrire, les groupes paroissiaux, les mouvements familiaux, les personnes, les théologiens sur les questions proposées par le Secrétariat général du Synode. Le diocèse de Nantes a apporté sa contribution. C’est aussi de travailler le document préparatoire au synode, « l’instrumentum laboris », d’en approfondir la réflexion, en le lisant en pasteur habité par les nombreuses rencontres de couples et de familles, par le travail théologique de l’Eglise. C’est enfin, l’intervention de trois minutes que je dois préparer sur un des numéros de « l’instrumentum laboris ». Cela suppose beaucoup de lecture mais aussi de prière. Car le premier invité permanent du synode, et le premier acteur, c’est l’Esprit-Saint qui, depuis les origines, guide et soutient l’Eglise du Christ.
A la suite du Synode extraordinaire d’octobre 2014, des travaux en diocèses, puis de la rencontre mondiale des familles en septembre, qu’attendez-vous de ce Synode comme évêque, signe d’une collégialité renforcée par le Pape François (on fêtera aussi les 50 ans de l’institution du Synodes des évêques par Paul VI le 17 octobre) ?
Quand des sondages sont réalisés près des jeunes générations, celles-ci soulignent l’importance qu’elles attachent au bonheur familial. J’attends du synode qu’il encourage, soutienne, éclaire les familles d’aujourd’hui dans leur vie et leur mission, et dans les choix importants auxquels elles sont confrontées. L’Evangile est pour elles. L’Eglise a un message d’espérance à délivrer. Les familles portent lourd parfois : il y a les incertitudes sur l’emploi du père ou de la mère de famille ; il y a l’éducation des enfants à envisager et leur avenir, dans une société complexe, très mobile, sécularisée au moins dans nos régions. Ce synode se vit à quelques semaines de l’ouverture de l’année sainte de la miséricorde : la miséricorde du Seigneur s’exerce sur les familles, sur chacun de ses membres dans la réalité de son existence faite d’ombres et de lumières. Plus concrètement encore, je serai sensible à la réflexion qui sera conduite autour de la préparation des couples au sacrement de mariage. C’est en effet, un des points d’attention que j’ai donné aux responsables de la Pastorale familiale dans le diocèse.
Le Pape François a répété plusieurs fois que l’assemblée du Synode n’est pas un parlement mais un lieu ouvert à l’Esprit Saint où la parrêsia doit être en quelque sorte la « règle » et où le travail en circuli minores est favorisé. A quoi doit-on s’attendre alors sur le débat autour du thème du Synode « La vocation et la mission de la famille dans l’Église et dans le monde contemporain » ?
Bien entendu, tous les participants au Synode arrivent à Rome avec leur travail de réflexion autour de ce thème, leur expérience pastorale et la particularité de leur diocèse, de leur pays. Ils arrivent aussi, avec les événements qui se déroulent, en ce moment, dans leur région : je pense, par exemple, aux évêques d’Orient. Mais il y a une expérience propre à une assemblée qui vit ensemble pendant trois semaines : le mot « synode », désigne le fait de passer le seuil ensemble d’une maison, et d’y demeurer : le synode s’ouvre par une procession d’entrée dans la basilique Saint Pierre, sous la présidence du Saint Père. Pendant ces trois semaines, un chemin est parcouru, par les participants, grâce à l’écoute réciproque, aux échanges, et à l’action de l’Esprit dans le cœur de chacun et dans l’animation de l’assemblée. C’est pourquoi la prière de l’Eglise tout entière est importante pendant le prochain synode.”