Suite aux récents vols de ciboires contenant des hosties consacrées à Moirans-en-Montagne et à Saint-Claude, Mgr Jordy a célébré une liturgie de réparation à Moirans et une messe de réparation à Saint-Claude.
Il a également rédigé un message à tous les diocésains :
Chers diocésains,
Il y a de cela quelques jours, deux églises de notre diocèse – Moirans-en-Montagne et la cathédrale de Saint-Claude – ont été profanées, des ciboires et des hosties consacrées ont été volés. Ces exactions font suite à d’autres événements du même type qui avaient eu lieu il y a quelques semaines dans les doyennés de la Petite Montagne et de Cousance.
Ces faits nous peinent profondément, non seulement par les dégâts causés et les objets volés, mais surtout, bien entendu, pour les atteintes faites aux réserves eucharistiques qui sont, pour nous, la présence vivante du Christ au milieu de nous.
Une fois la surprise passée, certains se sont interrogés, particulièrement les pouvoirs publics, sur la nécessité ou non de fermer ces lieux de culte devenus sensibles. Il me semble important de préciser la position qui doit être la nôtre comme Eglise catholique dans le Jura, en trois points.
Premièrement, il s’agit de faire tout ce qui est possible pour protéger ce qui est précieux et appartient au patrimoine religieux dans nos églises, quitte à conserver certains biens dans des lieux plus sécurisés. Une partie des objets du culte étant la propriété des communes, ces points sont à régler avec l’autorité communale.
Deuxièmement, du point de vue ecclésial, on peut assurer une réserve eucharistique réduite en conservant quelques hosties pour les malades dans une simple custode pour ne pas risquer d’autres vols.
Troisièmement, après un échange avec le Conseil Presbytéral, nous souhaitons que nos églises restent ouvertes, car elles ne sont pas des musées ou des dépôts d’art sacré. Elles sont ces lieux chargés d’histoire et de mémoire où la communauté chrétienne aime se rassembler pour célébrer le Christ et Le prier. Elles sont ces lieux où les baptisés aiment venir, seuls ou en famille, pour se confier au Seigneur et trouver un lieu propice à la prière. Elles sont aussi ces lieux où toutes les personnes de bonne volonté aiment venir contempler le témoignage du passé, mais aussi trouver un milieu porteur pour le recueillement et la sérénité.
Que nos églises soient donc toujours et autant que cela peut se faire des lieux ouverts pour manifester l’accueil de tous.
Voici son homélie lors de la messe de réparation :
Frères et sœurs,
Il n’était pas prévu que je vienne célébrer avec vous dans la cathédrale de notre diocèse en ce dimanche. Il était prévu, tout simplement, mais pleinement, que vous célébriez la joie de Pâques. En effet, depuis le matin de Pâques, que je célébrais avec vous, nous chrétiens nous nous réjouissons de la victoire de Jésus sur la mort et les ténèbres. Mais si je suis avec vous ce matin, c’est parce que nous sommes dans la peine. Cette peine vient du fait que le tabernacle de la chapelle de ce lieu saint a été ouvert de force, le ciboire volé, ainsi que les hosties qu’il contenait, ces hosties qui sont pour nous, dans la foi, la présence du Corps du Christ, Jésus qui se donne à nous.
1- Pour nous chrétiens, cette présence eucharistique n’est pas anonyme, n’est pas banale.
Jeudi Saint, ici même, nous avons célébré, en nous remémorant les derniers gestes de Jésus, les deux grands signes qu’il nous a faits pour nous manifester son amour. Il a, avant toute chose, lavé les pieds de ses disciples pour nous rappeler que le cœur de la vie chrétienne est le fait de servir. Il a ensuite prononcé la bénédiction, rompu le pain, qu’il a donné aux siens en disant : « Prenez et mangez-en tous, ceci est mon Corps… faites ceci en mémoire de moi ». Depuis des siècles, les communautés chrétiennes se réunissent pour refaire les gestes de Jésus, pour recevoir son Corps, sa vie. Ces communautés savent que par le don de la vie du Christ, c’est la présence de Jésus qui se poursuit au milieu des siens. Par cette présence, il nous nourrit, s’unit à nous. Par la communion à son Corps, la communion entre chaque baptisé et Jésus peut grandir, peut croître ; par la communion à son Corps, la communion entre les baptisés peut croître, la vie de l’Eglise se déployer. Mais cette présence, c’est aussi la présence de Celui qui est l’amour, la présence de Celui que nous aimons venir rencontrer. Combien de personnes, entrant dans une église, aiment venir s’arrêter un instant devant le Christ présent au tabernacle ; combien aiment venir trouver la paix, la consolation, auprès du Christ dans l’eucharistie. C’est pourquoi, partout où l’Eglise vit, elle souhaite garder cette présence : pour nourrir les malades, pour permettre la prière, pour que nos églises soient habitées, vivantes.
2- C’est bien pourquoi, en raison de cet amour pour l’eucharistie, de ce que l’eucharistie représente pour nous, nous sommes dans la peine.
Mais cette peine ne vient pas seulement de là. Cette peine, si vous le permettez, – car nous ne pouvons pas toujours taire la souffrance qui monte de nos cœurs -, cette peine est accrue par d’autres éléments. Bien entendu, ces vols d’hosties et de ciboires sont certainement le résultat d’exactions de personnes qui veulent voler des objets qu’elles pensent pouvoir revendre. Mais il arrive aussi que ces vols soient accompagnés de gestes de profanation, de signes manifestes pour blesser la foi ou la tourner en dérision. Il arrive aussi que la peine vienne du fait que ces vols, ces profanations, sont vécus dans un climat général dans notre pays qui donne parfois le sentiment que les catholiques ne comptent plus dans le paysage. Il ne s’agit pas, bien entendu, de jouer de manière malsaine sur une concurrence victimaire. Mais on s’alarme, et avec raison, pour les troisième, sixième ou douzième religions de France – sans savoir d’ailleurs comment on arrive à ces admirables résultats dans un pays où légalement toutes statistiques religieuses sont interdites -, mais on ne prête guère d’attention à celle qui demeure malgré tout la première. Il y a en France plus de 65 millions d’habitants, dont 44 millions de baptisés, comme le rappelait l’hebdomadaire La Vie dans un numéro récent ; mais cela n’a pas l’air de compter.
Oui, et je ne suis pas le seul à l’entendre, à l’éprouver, on sent monter un certain malaise, voire une certaine exaspération, chez bien des catholiques. Une exaspération qui relève peut-être d’abord du « déclassement » ou du désintérêt pour les chrétiens en France et au-delà. On sent en effet monter une exaspération en voyant que les chrétiens se font massacrer dans le monde sans que personne ne semble vraiment s’en offusquer au-delà des mots. On sent monter une exaspération en voyant qu’à la suite d’événements dramatiques à résonance religieuse dans notre pays, on s’empresse d’appeler au fait de ne pas faire d’amalgame, alors qu’on ne se gêne pas pour amalgamer toutes les religions pour les considérer comme problématiques, voire dangereuses, dans certains médias. On sent monter une exaspération d’être l’objet de quolibets, voire de mépris, jusqu’à vouloir gommer le mot chrétien des couloirs de la RATP, comme si le bien fait par de nombreux catholiques dans leur contribution à la vie sociale ne comptait pas. On sent surtout monter une exaspération de voir aujourd’hui le concept de laïcité manipulé par certains pour devenir une promotion de l’athéisme, un moyen d’occultation du religieux, voire une véritable idéologie anti-religieuse, comme le rappelait un sociologue du CNRS il y a quelques jours dans Ouest-France.
3- Mais, frères et sœurs, cette exaspération, ce malaise, ne doivent pas avoir le dernier mot dans nos cœurs. Ne nous laissons pas voler, ne nous laissons pas ravir notre joie, la joie de Pâques.
Dans l’évangile de ce jour, les deux disciples qui viennent de rencontrer mystérieusement Jésus vivant sur le chemin d’Emmaüs sont en train de témoigner de leur expérience aux apôtres. Et voilà que, au cœur de ce témoignage, Jésus se manifeste à eux : « La paix soit avec vous ». Et la joie l’emporte sur tout.
Et Jésus peut alors fortifier la foi des apôtres et des disciples réunis. Il va d’abord la fortifier en mangeant avec eux, pour bien signifier qu’Il n’est pas un fantôme ni une manifestation imaginaire. Il est vraiment là, au milieu d’eux, comme premier-né d’une nouvelle création. Il fortifie aussi leur foi en ouvrant leur intelligence aux Ecritures, afin qu’ils comprennent que dans l’événement de la Résurrection convergent et s’accomplissent les Ecritures. Pour rencontrer le Ressuscité de Pâques, goûter sa paix et éprouver la joie pascale, il nous faut faire comme les disciples d’Emmaüs. Il nous faut commencer par témoigner de Jésus ressuscité et vivre de Lui. C’est alors qu’Il se manifeste plus profondément en nous, en nous communiquant sa paix et en éclairant la Parole par son Esprit. Mais de plus, plus nous témoignons, plus la paix et la joie du Christ nous comblent, plus notre peine s’estompe, plus la joie l’emporte et la paix gagne nos cœurs. Que cette paix vous rejoigne, frères et sœurs, en ce jour. La liturgie nous y invite. Nous allons maintenant proclamer notre foi, qui va fortifier notre paix. Nous allons dans un instant communier au Corps du Christ ressuscité qui nous fera goûter la paix afin que nous en vivions et que nous la portions à tous les hommes, avant de goûter un jour la paix éternelle.
Amen.”
Bravo à Mgr Jordy pour sa décision de laisser les églises ouvertes. Les profanateurs et autres satanistes seraient ravis que les églises soient fermées, comme c’est hélas le cas dans beaucoup de villages en France. Les pouvoirs publics ne mettent pas beaucoup de zèle à rechercher les profanateurs.
EN 2009 dans ce diocèse:
SAINT-CLAUDE
Prêtres diocésains : 172
Séminaristes : 3 en 2009
Ordinations sacerdotales depuis 1994 : néant.
Baptêmes d’enfants : 1962 en 2001 (2096 en 1997 )
Baptêmes d’adultes : ?
Confirmations : 122 en 2001 ( 81 en 1997)
Mariages religieux : 589 en 2001 (717 en 1997)
2009 : 38 prêtres en activité
QUID DEPUIS?
Rien de plus que de l’émotionalisme passif, décidement.
Au moins voilà une homélie qui frappe et qui est bien dans l’allure du vécu des catholiques. Les mots et les idées sont lâchés avec force. Puissent TOUS les ecclésiastiques disant la messe avoir ce franc parler dès lors que des évènements frappent l’Église et l’église.
Très bonne homélie, disant tout haut ce que pensent et subissent les catholiques, étant honnis par les différents gouvernement, la société, et donnant un message d’espérance pascal. Merci à Mgr Jordy et c’est pas parce qu’il n’y a plus de vocation, que tout semble perdu, que Mgr n’a pas à proclamer haut et fort ce qu’il a à dire.
La peine, le malaise ressentis par les paroissiens sont très bien exprimés; Il serait peut-être utile de répercuter avec force ces sentiments jusqu’au gouvernement
La seule solution pour éviter les profanations d’églises c’est d’organiser dans chaque paroisse des tours de personnes sentinelles équipées de sifflets et un téléphone dans le groupe, et au moindre signe suspect on prévient les personnes autorisées!
Cela se fait de plus en plus, pourquoi nous ne l’appliquons pas ?
@Léa: combien d’églises en France? Combien de personnes faut-il pour assurer disons 10h par jours, 7j/7 un tour de garde dans une église? Combien de personnes prêtes à s’investir ainsi dans un village de 10, 100 ou 1000 habitants (20 000 communes en France, comptant probablement autant d’églises, ont moins de 500 habitants. Les communes du Jura sont nombreuses dans cette catégorie)?
L’animation de paroisses et communautés chrétiennes dans ces petites communes était déjà une gageure lorsqu’il y avait de nombreux prêtres et des fidèles pour remplir pour les églises. Mais aujourd’hui, le défi de l’animation, de l’entretien et de la préservation de ces trésors est un défi considérable. Les bonnes idées sont bienvenues, mais ne tombons pas dans le simplisme…