À la suite de l’article qui traitait de la bulle d’indiction du jubilé de la miséricorde, un lecteur a bien voulu nous rappeler le texte auquel se rapportait la citation du cardinal Henri de Lubac.
Nous pensons qu’elle peut être méditée, car elle interroge tous ceux qui font le choix du social “pur” ou qui seraient tentés d’oublier la nécessité du salut et de la sanctification:
Un paradis social peut être un enfer spirituel ; – auquel cas, d’ailleurs, il cesserait bien vite d’être même un paradis social. Il peut être aussi tout simplement un désert spirituel, et s’il dure, alors ce ne peut être qu’au bénéfice d’une humanité diminuée, atrophiée.
Aussi tout comme il y aurait hypocrisie à négliger l’œuvre sociale tant que n’est pas accomplie l’œuvre, jamais achevée, d’éducation spirituelle, tout de même il serait inhumain de laisser ignorer à l’homme sa plus haute noblesse, de le détourner de lui-même et d’étouffer en lui la nostalgie de sa patrie divine tant que n’est pas achevée l’indispensable œuvre sociale, – elle-même sans doute à jamais inachevable.
Il faut appliquer ici, tout en la retournant, la consigne marxiste selon laquelle doivent s’épauler réciproquement l’action révolutionnaire et la lutte antireligieuse en vue de la libération totale.
Les deux efforts, social et spirituel, doivent aller de pair. Chacun est garant du sérieux de l’autre et de son authenticité. Sans le souci de ses conséquences sociales et temporelles, la vie spirituelle est faussée ; sans approfondissement spirituel, tout progrès social demeure indigne de l’homme et peut finalement se retourner contre lui. Dieu, pour qui l’homme est fait, ne peut être atteint que par leur convergence.
Henri de Lubac, Paradoxes, Cerf, 1999
Dieu que c’est vrai !