Le père Renaud Laby, en Master 2 à l’EPHE à Paris, fait une étude sociologique des sites internet diocésains et paroissiaux. Il répond au diocèse de Gap :
“Il s’agit pour moi de faire une sociologie de ses sites: que proposent-ils ? Qui en sont les acteurs et qui sont ceux qui les visitent ? Le but est de vérifier si ces sites sont seulement des sites de renforcement de l’appartenance communautaire des catholiques ou s’ils sont également des sites d’évangélisation qui touchent des internautes très éloignés de l’Église. Pour ne pas me perdre dans la multitude des sites existants, j’ai choisi de limiter mon étude aux corpus de sites hébergés par le site portail de la Conférence des évêques de France, soit environ 450 sites au total. Ma démarche de recherche repose essentiellement sur des enquêtes en ligne à destination des internautes et des responsables éditoriaux des sites et sur des entretiens avec quelques-uns de ces derniers. J’essaierai ensuite de mettre en perspective ces données avec ce que la sociologie des religions établit aujourd’hui du positionnement des catholiques en France et dans le contexte de la modernité religieuse marquée par l’individualisation, la déterritorialisation et le bricolage des pratiques.
Vous avez choisi une dizaine de sites diocésains pour en faire une étude plus approfondie, dont celui du diocèse de Gap et d’Embrun. Pourquoi ?
Pour deux raisons, la première c’est que le site du diocèse de Gap et d’Embrun figure parmi les dix sites les plus visités dans le corpus étudié, avec un taux d’environ 60 visites par mois pour 1 000 habitants – à titre de comparaison celui du diocèse de Paris n’en reçoit que 45. La seconde raison tient dans le fait qu’il est un des rares sites en France a offrir à l’internaute la possibilité de déposer un commentaire à la suite des articles en ligne.
Quelques lignes forces déjà ?…
Oui, elles existent. D’une part, il apparaît que les 10% de sites diocésains les plus visités sont tous – exception faite de celui du diocèse de Paris – liés à des territoires de moins de 300 000 habitants et sont, pour un certain nombre, des diocèses de montagne ou de moyenne montagne : Pamiers, Tarbes et Lourdes, Cahors, Le Puy, Gap et Embrun, mais aussi Cayenne, là ce n’est pas la montagne qui fait obstacle, mais la forêt. Dans l’ensemble, les responsables éditoriaux des sites abondent dans le sens de mon analyse: sur ces territoires accidentés, où les catholiques sont isolés les uns des autres, le site web diocésain relie les internautes à l’Église diocésaine qui valide et légitime leur adhésion à la foi catholique. Toutefois, il ne faudrait pas voir là le seul facteur de fréquentation du site. Chaque site diocésain est marqué par une particularité : celui de Gap et d’Embrun est porté par la figure charismatique de son évêque, pour celui de Lourdes, il faut compter avec l’influence du sanctuaire marial, pour celui de Pamiers avec l’histoire locale et avec la figure d’un responsable éditorial, ancien journaliste, qui a transformé le site diocésain en plateforme de travail pour des dizaines de groupes, etc… Une autre tendance apparaît : les femmes sont les plus grandes visiteuses des sites diocésains, à plus 61% contre seulement 38% d’hommes. Il est même possible d’établir le profil type de la visiteuse de site en analysant les commentaires déposés sur le site du diocèse de Gap et d’Embrun et les enquêtes en ligne menées auprès des internautes : il s’agit d’une femme de plus de 50 ans, issue de la classe moyenne, occupant ou ayant occupé un poste de cadre ou d’enseignant, catholique pratiquante, engagée bénévolement dans sa paroisse et qui ne remet pas en cause la parole magistérielle. Force est de constater qu’il s’agit là du profil féminin qui soutient aujourd’hui la vie des paroisses. Ces données donnent à penser que les sites diocésains, très peu visités par des internautes non-croyants, contribuent donc au renforcement de l’appartenance communautaire. Aussi, suis-je tenté de penser que le Web n’est pas vraiment un continent numérique déconnecté du réel ! Au contraire, il pourrait bien n’être en fait que le prolongement de celui. Il n’est dès lors pas étonnant qu’il reproduise en ligne les cloisonnements de la réalité, en sorte que les enjeux de l’évangélisation sur le Web sont les mêmes que dans la « vraie vie », Internet ne facilite pas cet appel lancé par le Pape François : aller porter la Bonne Nouvelle aux périphéries existentielles de l’humanité !”
Quelle est l’adresse e-mail du R.P.Renaud Laby ?
Merci . Cordialement.
Cette vérité de l’inanité du christianisme numérique réside d’abord dans la nature des choses plus que dans leur dénombrement…
http://luc1249.wordpress.com/2012/03/22/un-christianisme-numerique-est-il-possible/
Triste de constater qu’un prêtre trouve la même conclusion par un boulot d’éxécutant analytique alors que le sens des choses le fait tout autant…