La presse révèle qu’un patient de 61 ans est mort mercredi dernier dans un hôpital de Bordeaux à la suite d’une inversion accidentelle de seringues, « après avoir reçu en intraveineuse une dose de chlorure de potassium au lieu de l’injection de corticoïdes prescrite ». Une information pour homicide involontaire a été ouverte. Il s’agit clairement d’une « erreur d’administration médicamenteuse », précisé le communiqué de l’Institut Bergonié, spécialisé en oncologie. Les emballages des deux seringues étaient étiquetés, et non les seringues elles-mêmes, a indiqué Marie-Madeleine Alliot, procureur de la République de Bordeaux.
Le patient était hospitalisé dans une unité de soins palliatifs de l’Institut Bergonié.
On sait d’ores et déjà que la seringue de chlorure de potassium était en réalité destinée à un patient se trouvant dans une autre chambre.
Et là on se pose évidemment des questions. Dans cet établissement qui accueille des malades du cancer, y compris en soins palliatifs, injecterait-on volontairement des doses létales de chlorure de potassium comme celle administrée par erreur au malade décédé mercredi ? Une euthanasie était-elle programmée, mais s’est on simplement trompé de victime ?
L’administration du chlorure de potassium n’est pas forcément destinée à tuer le patient : elle a au contraire généralement pour objet de pallier un manque de potassium et, même s’il s’agit d’un médicament « à haut risque », son usage est répertorié. Mais uniquement sous forme diluée – la dilution devant être réalisée par du personnel formé – par perfusion en intraveineuse, avec une durée minimale de pose, et sous contrôle précis, deux personnes devant intervenir en principe pour vérifier l’ampoule initiale ayant servi à la dilution et l’étiquetage, la concentration et la vitesse de perfusion (directives de l’ARS en Ile-de-France).
Les accidents par confusion de produit sont rares mais se comptent tout de même par dizaines dans le monde, raison pour laquelle les procédures ont été mises en place pour que ces morts « évitables » ne se reproduisent plus – tardivement en France comme le montre cet article. Une circulaire du 14 février 2012 attire l’attention des établissements de santé sur la gestion de ces risques.
Il semble en tout cas que l’ampoule de chlorure de potassium (KCl) soit clairement identifiable : elle n’existe que dans deux dosages, un pour adulte, un pour enfant, et présente une apparence non moins reconnaissable :
On imagine mal que la jeune infirmière étudiante en troisième année qui a administré la piqûre mortelle en présence de l’infirmière confirmée qui la surveillait ait vu cette ampoule.
Elle n’aurait donc vu que la seringue. Avec un produit dilué ? Non dilué ?
S’agissait-il de deux seringues à intraveineuse ? Sauf erreur, on n’injecte pourtant pas du KCl directement en intraveineuse…
Les seringues à intraveineuse sont-elles différentes des autres ? Un étudiant infirmier est-il habilité à faire des injections en intraveineuse ?
Autant de questions qui se posent. Peut-être des infirmiers pourraient-ils nous éclairer…
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question très angoissante, en effet ! la vie n’étant respectée nulle-part, on peut s’attendre à tout !
Aux États-Unis, les injections létales aux condamnés à mort se font le plus souvent par une association séquentielle de trois produits : un barbiturique d’action rapide (penthiobarbital sodique) à titre de sédatif, un curare paralysant les muscles et donc la respiration (supprimant toute réaction choquante pour les spectateurs ou acteurs), du chlorure de potassium provoquant l’arrêt cardiaque lorsqu’il est correctement administré en intraveineuse. Les injections se font toujours à l’aide d’une perfusion (baxter) de chlorure de sodium (sérum physiologique) et injection secondaire dans la trousse de perfusion. Mais, comme encore récemment, lorsque le chlorure de potassium est administré en paraveineux (donc sous-cutané ou intramusculaire) l’injection est douloureuse, n’entraîne pas la mort immédiatement, mais éventuellement de manière différée.
Votre titre d’article est absolument détestable…poser cette question est absolument odieux!!!
Il y a sur les poches de sérum un petit orifice fermé bien sur..mais qui peut être perforé par une aiguille et qui se referme ensuite.
La préparation peut y être injectée et est automatiquement et complètement diluée dans la poche sérum…
Les soignants doivent toujours faire plusieurs choses en même temps…les erreurs sont possibles comme dans les autres métiers…
Maintenant l’enquête est en cours, attendons…avant de dire des choses difficiles!
Tout mon soutien à cette infirmière, à cette élève infirmière et à tout le personnel soignant.
Les hôpitaux français sont devenus des repaires de médecins tueurs.
Cher Toto,
vous ne connaissez pas les hôpitaux belges et néerlandais.
Cher Harwey
en effet, je ne parle que de ce que je connais. Mais je ne me fais aucune illusion sur l’état moral des médecins dans les autres pays.
Je suis infirmière. et suis d’accord avec a.picadestats. J’ai été choquée que vous posiez la question. On injecte le potassium dans une poche de perfusion de 500 cc ou 1 L (en général G5% ou sérum phys), on peut de la même façon y rajouter du chlorume de sodium NaCl (alias sel). L’erreur est ce que nous appréhendons le plus à cause de la pression et de la charge de travail. Je pense qu’il faut pas tout mélanger, les hôpitaux ne sont pas tous des vecteurs de mort,Moi aussi mon soutien à cette élève et à l’IDE qui l’avait en charge, car leur vie est foutue, elles se le pardonneront jamais d’avoir fait une erreur. C’est une chose qu’on souhaite à personne. C’est pas parce qu’on parle de débat sur l’euthanasie, et même si la loi passe, tous les soignants ne vont pas devenir des tueurs. Laissons la place à l’enquête. Je pense aussi à cette personne décédée et à sa famille.
Je trouve que le raccourci que vous faites est trop facile, on fait régulièrement du “potassium” dans les poches de perfusion et du sodium encore plus, tant les gens sont déshydratés, que ce soit en IV ou en S/C. Et c’est contrôlé par une prise de sang qu’on appelle ionogramme (iono pour faire court).
Je crois en effet aussi qu’il ne peut s’agir que d’une très regrettable erreur, que cette élève infirmière n’avait aucune intention d’envoyer ce patient ad patres, et que elle se le reprochera toute sa vie. Elle mérité plus que notre compassion, notre soutien.
Il n’empêche que le chlorure de potassium en I.V. est une des méthodes possibles pour l’euthanasie et qu’il es permis de se poser des questions, et même c’est un devoir. Il est aussi utile d’attirer l’attention sur les risques d’un traitement dangereux.
Par ailleurs dans les services où l’euthanasie est pratiquée, c’est souvent l’infirmière qui est chargée, volens nolens, de l’effectuer. Il ne faut pas ‘illusionner sur la liberté laissée au personnel soignant, ni même au médecin (v. Bogdan Chazan).
Une histoire pas très rassurante. On serait tenté d’éviter cet hôpital de Bordeaux mais hélas, ce type d’accidents peut survenir dans n’importe quel établissement…