dernier. Ce mois-là, le service fédéral des US Customs and Border Protection bloquait en douane à l’aréoport international Sunport d’Albuquerque (Nouveau
Mexique) 14 bidons d’une contenance de 10 gallons (soit environ 38 litres chacun), en provenance de France, remplis d’eau, mais dont le manifeste pour la douane ne signalait aucune valeur
commerciale. Les gabelous américains ont au moins ceci de commun avec leurs confrères français c’est qu’ils sont naturellement suspicieux.
L’expédition étant destinée au Shrine of St. Bernadette (c’est-à-dire au Sanctuaire de Sainte Bernadette) d’Albuquerque, il fallut que Dan Paulos, directeur financier du sanctuaire, vienne parlementer et expliquer qu’en effet la valeur commerciale était nulle, s’agissant d’un don du Sanctuaire de
Lourdes à celui d’Albuquerque, même s’il lui avait coûté 3 200 $ de frais d’expédition.
Il s’agissait là d’une livraison d’eau de la source miraculeuse de Lourdes… Le Père Tom Zotter, recteur de The Shrine of
St. Bernadette (www.shrineofstbernadette.com), dira plus tard à l’Albuquerque Tribune que si elle
ne présentait pas de valeur commerciale cette eau en avait une «incommensurable » puisque provenant de la source miraculeuse de la grotte de Massabielle… Le Shrine of St. Bernadette est l’un des trois distributeurs officiels de l’eau de Lourdes, et il l’est pour toute l’Amérique du Sud-Ouest depuis 2005. Ce n’est guère
très lucratif puisque les pèlerins qui se rendent au sanctuaire peuvent remporter chez eux un petit flacon d’eau d’environ 88 ml pour un modique don d’1 $, quant à ceux qui souhaiteraient en
obtenir par poste, ils ne sont tenus qu’à acquiter les frais de port – alors que le litre coûte 6 $ au sanctuaire…
Toujours est-il que les échanges entre les sanctuaires de Lourdes et d’Albuquerque ne se limitent pas à l’eau de la source miraculeuse, car nous apprenions, par la même dépêche,
que Monseigneur Raymond Zambelli, recteur du sanctuaire de Lourdes, était à Albuquerque samedi et dimanche derniers pour prêcher aux deux messes
quotidiennes du Shrine of St. Bernadette.
Je dois avouer que j’éprouve infiniment de tendresse à ces échanges entre la France et les États-Unis dans ce domaine des sacramentaux, voire dans celui des reliques. J’ai consacré
tout un dossier de L’Homme Nouveau à l’extraordinaire pérégrination de la relique du cœur de Jean-Marie Vianney,
le saint Curé d’Ars, en Amérique, du 7 au 15 octobre dernier [1].
Mais pour revenir au Shrine of St. Bernadette et au diocèse de Santa Fe (www.archdiocesesantafe.org) où il se trouve [2], je voudrais encore vous livrez quelques informations afin que vous compreniez combien le rôle éminent qu’a
tenu le catholicisme français dans l’édification du catholicisme aux États-Unis, ce qui est une des raisons d’être de ce blog…
C’est en 1959 que fut fondée la paroisse St. Bernadette à Albuquerque, par Mgr Edwin Byrne,
huitième ordinaire du diocèse de Santa Fe. Puis, le 7 octobre 2003, en la Fête de Notre-Dame du Rosaire et pour marquer le soixante-dizième anniversaire de la canonisation de Bernadette Soubirous, Mgr Michael Sheehan, onzième ordinaire, élevait la paroisse au rang de sanctuaire, les pèlerins s’y
rendant pouvant désormais bénéficier d’une indulgence plénière aux conditions habituelles : s’être confessé une semaine avant ou une semaine après le pèlerinage, recevoir la Sainte Communion et
réciter un Pater, un Ave et une Doxologie aux intentions du Souverain
Pontife.
Je crois qu’on l’ignore en France – et qu’on ne s’en souvient plus très bien aux États-Unis –, mais la succession au siège apostolique de Santa Fe a ceci de particulier – à défaut
d’être unique là-bas… – d’avoir commencé par un Français auquel quatre autres ont succédé !
En voici la liste :
1. Jean-Baptiste Lamy (né en France le 11 octobre 1814) ; ordonné prêtre pour le diocèse de Cincinnati (Ohio) en décembre 1838 ; nommé
vicaire apostolique et évêque in partibus d’Agathonice le 23 juillet 1850 (sacré le 24 novembre suivant) ; nommé évêque de Santa Fe le 29 juillet 1853 (le
diocèse ayant été érigé le 23 précédent) ; nommé archevêque le 12 novembre 1875 (date de l’élévation du diocèse en archidiocèse) ; démissionne le 18 août 1885 ; rappelé à Dieu le 24 novembre
suivant.
2. Jean-Baptiste Salpointe (né en France le 22 février 1825) ; nommé vicaire apostolique de l’Arizona et évêque in partibus de Dorylaëum le 25 septembre 1868 (sacré le 20 juin 1869) ; nommé coadjuteur de Santa Fe le 22 avril 1884 ; succède à Mgr Lamy le 18 août 1885 ;
démissionne le 7 janvier 1894 ; rappelé à Dieu le 15 juillet 1898.
3. Placide Louis Chapelle (né en France le 28 août 1842) ; ordonné prêtre pour l’archidiocèse de Baltimore le 28 juin 1865 ; évêque
auxiliaire de Santa Fe le 21 août 1891 (sacré le 1er novembre suivant) ; nommé coadjuteur le 12 mai 1893; succède à Mgr Salpointe le 7 janvier 1894 ; démissionne le 1er décembre 1897, ayant été
nommé archevêque de la Nouvelle Orléans ; rappelé à Dieu le 9 août 1905.
4. Pierre Bourgade (ou Bougarde, né en France le 17 octobre 1845) ; nommé vicaire apostolique de l’Arizona et évêque in partibus de Thaumacus le 7 février 1885 (sacré le 1er mai suivant) ; nommé évêque de Tucson (Arizona) le 10 mai 1897 ; nommé archevêque de Santa Fe le 7 janvier
1899 ; rappelé à Dieu le 17 mai 1908.
5. Jean-Baptiste Pitaval (né en France le 10 février 1858) ; ordonné prêtre pour le diocèse de Colorado le 24 novembre 1881 ; nommé évêque
auxiliaire de Santa Fe et in partibus de Sora le 15 mai 1902 (sacré le 25 juillet suivant) ; nommé archevêque de Santa Fe le 3 janvier 1909 ; démissionne
le 29 juillet 1918 ; rappelé à Dieu le 23 mai 1928.
C’est-à-dire que le dernier archevêque français des États-Unis était encore en vie voici à peine soixante-dix neuf ans…
[1] L’Homme Nouveau, n° 1 386 du 6 janvier 2007. On doit toujours pouvoir se procurer cette livraison en appelant le standard du journal au
01 53 68 99 77.
[2] Le diocèse qui s’étend sur près de 159 000 km2, compte 91 paroisses et 216 missions désservies par 214 prêtres (chiffre de 2004) en ministère auprès
d’une population d’environ 250 000 catholiques (20 % de la population).