L’archevêque de Cincinatti, Ohio, Mgr Dennis Schnurr a récité le rosaire avec quelque 200 fidèles, selon la presse locale, devant le Women’s Health Center de la ville (« Centre de santé des femmes », un avortoir), dimanche après-midi. Même si un tel engagement d’un évêque n’est pas rare aux Etats-Unis, c’est à chaque fois un témoignage et une leçon pour nous, de l’autre côté de l’Atlantique, où les prières pour la vie aux abords des avortoirs sont volontiers présentés comme des affaires d’extrémistes et où les évêques catholiques français brillent plutôt par leur absence.
La prière publique de Dayton s’inscrivait dans la campagne « 40 Days for Life » (40 jours pour la vie) que mon excellent confrère Daniel Hamiche présente sur
Americatho.
J’en parle ici pour saluer l’engagement de tant de catholiques américains pour la vie : ils n’ont pas peur de témoigner, et ils obtiennent, malgré un environnement politico-médiatique encore plus hostile qu’ici, des résultats sur le terrain. Aujourd’hui, tous les sondages montrent que les Américains sont en majorité hostiles à l’avortement légalisé, et ce sont les jeunes qui forment la plus grosse cohorte des pro-vie. Sans la mobilisation publique inlassable, généreuse, pacifique de groupes de catholiques – souvent des jeunes qui sacrifient chaque semaine plusieurs heures de leur temps libre pour prier aux abords des avortoirs – il n’est pas dit qu’on aurait obtenu les mêmes résultats.
Et dans l’Ohio, selon des informations tombées la semaine dernière, le nombre d’avortements a régressé dans cet Etat pour la 10e année consécutive, passant de 38.140 en 2000 à 28.721 en 2009.
Devant le centre d’avortements de Dayton, Mgr Schnurr a expliqué qu’il avait eu plaisir à voir des gens se rassembler d’une manière pacifique et priante pour obtenir la fin de l’avortement. « La chose la plis importante qui se passe ici, c’est la prière », a-t-il souligné, « mais nous voulons aussi exhorter le public à penser à ce que nous sommes en train de faire, en tant que société, en détruisant ceux qui en sont l’avenir ».
S’adressant aux participants après la récitation du rosaire, il les a d’ailleurs encouragés à continuer de prier aussi bien pour ceux qui portent le « cicatrice de la l’avortement » que pour ceux qui ne voient pas le mal de l’avortement.
L’organisatrice de la réunion, Mary Britt, invitait quant à elle les passants à signer une pétition pour obtenir une loi contre les avortements tardifs dans l’Etat de l’Ohio : illustration du principe selon lequel, dans le cadre d’une opposition personnelle connue contre l’avortement légalisé en général, il est possible de chercher à avancer de manière progressive pour atteindre ce but.
J’entends déjà certaines réactions françaises : la France n’est pas les Etats-Unis, ici la culture est trop laïcisée pour espérer pouvoir agir de cette manière, aux Etats-Unis la notion de Dieu est toujours très présente, les médias sont trop hostiles…
C’est à la fois vrai et faux. Certes beaucoup de catholiques et surtout de jeunes catholiques ne connaissent même plus leur foi (mais à qui la faute ?) et la religion n’a pas le même droit de cité qu’outre-Atlantique… Encore que. Au-delà des mots, le laïcisme est bien présent aux Etats-Unis et ses grands médias sont largement aussi hostiles que les nôtres à la culture de vie. Les pro-vie américains ne sont pas moins à contre-courant que les pro-vie d’Europe. Sont-ils le petit nombre ? Soit. Mais alors pour un temps, car ils n’acceptent pas de ne pas pouvoir s’exprimer publiquement et clairement sur le sujet. Ils n’arguent pas de leur petit nombre pour dire que cela ne sert à rien de témoigner publiquement. Ce serait s’avouer vaincu d’avance. Et ils osent invoquer Dieu et sa Loi – naturelle ! –, sans laquelle après tout il n’y aurait pas de raison de s’opposer à l’assassinat des tout-petits qui aurait l’air de ne gêner personne.
Sauf les mamans qui avortent, qui portent tout le poids de cette tragédie dans leur corps et dans leur cœur…