Suite à l’agression d’une procession à Nanterre, Mgr Rougé a été interrogé par Famille chrétienne. Extrait :
Les chrétiens sont-ils souvent la cible d’attaques dans votre diocèse ?
Il y a de temps en temps des indices inquiétants, chaque fois pris en compte avec une grande réactivité par les forces de l’ordre, mais globalement nos lieux de culte ne rencontrent pas de difficulté majeure. En revanche, des fidèles parfois isolés dans certaines grandes cités me disent qu’eux-mêmes ou leurs enfants sont l’objet de paroles désobligeantes voire inquiétantes liées à leur foi chrétienne. L’attention des pouvoirs publics à la mixité sociale doit sans doute se doubler d’un engagement des croyants eux-mêmes pour la diversité religieuse. La vitalité des paroisses comme celles où ont eu lieu les violences du 8 décembre est donc de première importance, non seulement pour l’Eglise mais aussi pour la société.
En quoi est-ce important pour les catholiques d’être visibles dans l’espace public ?
La question est moins de rechercher la visibilité pour elle-même que de pouvoir vivre pleinement et simplement la foi chrétienne, qui peut passer à l’occasion de certaines fêtes par des processions comme le 8 décembre, un début de célébration devant les églises comme aux Rameaux, un temps de partage fraternel sur un parvis. La liberté religieuse ne serait pas pleinement humaine si elle n’incluait pas cette part d’extériorité et d’expression collective. La dimension religieuse de notre vie humaine et sociale n’a pas à être reléguée même s’il est normal que les manifestations extérieures de la foi soient régulées par le droit et les exigences propres de l’ordre public.
Que faire pour qu’un tel événement ne se reproduise pas ?
Sans doute faudra-t-il à court terme préciser avec les pouvoirs publics les dispositifs de sécurité nécessaires pour ce genre de processions. La qualité de nos relations de travail habituelles permettra d’y parvenir sans difficulté. A moyen et long terme, c’est je pense une meilleure connaissance mutuelle des paroissiens et des autres habitants de leur quartier qui permettra d’éviter des tensions. Je ne veux pas m’exprimer à la place des paroissiens mais y réfléchir avec eux. Dans ce domaine aussi, la synodalité, la responsabilité fraternellement partagée est le moyen de l’authentique progression évangélique.
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Comment faire pour que le dialogue entre chrétiens et musulmans soit réellement efficace et suivi d’effets ?
Le dialogue est trop souvent une affaire de spécialistes : il faut sans doute qu’il implique plus largement les croyants de part et d’autre pour qu’il n’engage pas seulement des porte-paroles mais suscite vraiment chez tous des attitudes de respect et de paix. Pour cela, du point de vue catholique, il faut cesser d’opposer dialogue et annonce au risque de favoriser la division entre ceux qui sont plus attachés à l’un et ceux qui sont surtout motivés par l’autre. On dialogue d’autant plus respectueusement qu’on a le désir de partager paisiblement ce que l’on porte de plus précieux. Enfin, nous sommes tous appelés à cultiver les amitiés simples de proximité qui, peu à peu, transformeront les relations entre tous. Je ne me fais pas d’illusion sur la difficulté du chemin à parcourir mais nous ne pouvons pas, avec la force que nous donne le Seigneur, ne pas nous y engager.