L’Eglise fête aujourd’hui l’Epiphanie. La fête peut être solennisée en France dans la liturgie traditionnelle (forme extraordinaire calendrier liturgique dit de 1962) le dimanche qui suit la fête c’est-à-dire cette année le 12 janvier.
Ecoutons les paroles de Dom Prosper Guéranger (Extrait de l’Année Liturgique) :
La Fête de l’Epiphanie est la suite du mystère de Noël ; mais elle se présente, sur le Cycle chrétien, avec une grandeur qui lui est propre. Son nom. qui signifie Manifestation, indique assez qu’elle est destinée à honorer l’apparition d’un Dieu au milieu des hommes !
Ce jour, en effet, fut consacré durant plusieurs siècles à fêter la Naissance du Sauveur ; et lorsque, vers l’an 376, les décrets du Saint-Siège obligèrent toutes les Eglises à célébrer désormais, avec Rome, le mystère de la Nativité au 25 décembre, le 6 janvier ne fut pas entièrement déshérité de son antique gloire. Le nom d’Epiphanie lui resta avec la glorieuse mémoire du Baptême de Jésus-Christ, dont une tradition fixe l’anniversaire à ce jour.
L’Eglise Grecque donne à cette Fête le vénérable et mystérieux nom de Théophanie, si célèbre dans l’antiquité pour signifier une Apparition divine. On trouve ce nom dans Eusèbe, dans saint Grégoire de Nazianze, dans saint Isidore de Péluse ; il est le propre titre de la Fête dans les livres liturgiques de l’Eglise Grecque.
Les Orientaux appellent encore cette solennité les saintes Lumières, à cause du Baptême que l’on conférait autrefois en ce jour, en mémoire du Baptême de Jésus-Christ dans le Jourdain. On sait que le Baptême est appelé dans les Pères illumination, et ceux qui l’ont reçu illuminés.
Enfin, nous nommons familièrement, en France, cette fête la Fête des Rois, en souvenance des Mages, dont la venue à Bethléhem est particulièrement solennisée aujourd’hui.
L’Epiphanie partage avec les Fêtes de Noël, de Pâques, de l’Ascension et de la Pentecôte, l’honneur d’être qualifiée de jour très saint, au Canon de la Messe ; et on la range parmi les fêtes cardinales, c’est-à-dire parmi les solennités sur lesquelles repose l’économie de l’Année liturgique. Une série de six Dimanches emprunte d’elle son nom, comme d’autres successions dominicales se présentent sous le titre de Dimanches après Pâques, Dimanches après la Pentecôte.
Par suite de la Convention faite en 1801 entre Pie VII et le Gouvernement français, le légat Caprara procéda à une réduction des fêtes, et la piété des fidèles en vit, à regret, supprimer un grand nombre. Il y eut des solennités qui ne furent pas supprimées, mais dont la célébration fut remise au Dimanche suivant. L’Epiphanie est de celles qui subirent ce sort ; et toutes les fois que le 6 janvier n’est pas un Dimanche, nos Eglises voient retarder jusqu’au Dimanche suivant les pompes qui accompagnent un si grand jour dans tout l’univers catholique. Espérons que des jours meilleurs luiront enfin sur notre Eglise, et qu’un avenir plus heureux nous rendra les joies dont la sage condescendance du Saint-Siège nous a sevrés pour un temps.
Ce jour de l’Epiphanie du Seigneur est donc véritablement un grand jour ; et l’allégresse dans laquelle nous a plongés la Nativité du divin Enfant doit s’épanouir, tout de nouveau, dans cette solennité. En effet, ce second rayonnement de la Fête de Noël nous montre la gloire du Verbe incarné dans une splendeur nouvelle ; et sans nous faire perdre de vue les charmes ineffables du divin Enfant, il manifeste dans tout l’éclat de sa divinité le Sauveur qui nous a apparu dans son amour. Ce ne sont plus seulement les bergers qui sont appelés par les Anges à reconnaître le VERBE FAIT CHAIR, c’est le genre humain, c’est la nature entière que la voix de Dieu même convie à l’ adorer et à l’écouter.
Or, dans les mystères de sa divine Epiphanie, trois rayons du Soleil de justice descendent jusqu’à nous. Ce sixième jour de janvier, sur le cycle de Rome païenne, fut assigné à la célébration du triple triomphe d’Auguste, auteur et pacificateur de l’Empire; mais lorsque notre Roi pacifique, dont l’empire est sans limites et pour jamais, eut décidé, par le sang de ses martyrs, la victoire de son Eglise, cette Église jugea, dans la sagesse du ciel qui l’assiste, qu’un triple triomphe de l’Empereur immortel devait remplacer, sur le Cycle régénéré,les trois triomphes du fils adoptif de César.
Le six janvier restitua donc au vingt-cinq décembre la mémoire de la Naissance du Fils de Dieu ; mais, en retour, trois manifestations de la gloire du Christ vinrent s’y réunir dans une même Epiphanie : le mystère des Mages, venus d’Orient sous la conduite de l’Etoile, pour honorer la Royauté divine de l’Enfant de Bethléhem ; le mystère du Baptême du Christ, proclamé Fils de Dieu, dans les eaux du Jourdain, par la voix même du Père céleste ; enfin le mystère de la puissance divine de ce même Christ, transformant l’eau en vin, au festin symbolique des Noces de Cana.